40.
Le besoin général d'agir qui nous écarte de la vérité a sa source dans l'orgueil, vice qui a pour conséquence d'inspirer à l'âme le désir d'imiter au lieu de servir Dieu. C'est donc avec raison qu'il est écrit dans les saintes Lettres: « Le commencement de l'orgueil chez l'homme est de s'éloigner de Dieu; » ou encore: « le commencement de toute faute, c'est l'orgueil. » Et l'on ne saurait mieux définir l'orgueil que par ces mots de l'Ecriture : « D'où vient que la cendre et la poussière s'enorgueillit, elle qui jette au dehors ses propres biens1? » En effet, l'âme n'étant rien par elle-même, autrement elle serait au-dessus du changement et ne perdrait rien de la plénitude de son être, l'âme, dis-je, n'étant rien par elle-même et tenant toute son essence de Dieu, tant qu'elle reste dans sa condition, elle possède par la communication avec Dieu toutes les forces de sa raison et de sa conscience ; par conséquent, c'est un trésor qu'elle possède intérieurement. Donc être enflé d'orgueil consiste pour elle à se répandre au dehors, à s'épuiser pour ainsi dire et dès lors à avoir moins d'être. Or se répandre au dehors, qu'est-ce, sinon sacrifier les biens du dedans, en d'autres termes tenir Dieu éloigné de soi, non par la distance dans l'espace, mais par les dispositions de l'âme?
Eccli. X, 14; 15. 9, 10. ↩
