XVIII.
Mais ce qui les empêche d'apercevoir dans le Fils la communauté des noms paternels, c'est que l'Ecriture proclame souvent l'unité de Dieu, comme si la même Ecriture ne nous montrait pas souvent deux Dieux et deux Seigneurs, ainsi que nous l'avons prouvé plus haut.
---- Puisque nous lisons tantôt qu'il n'y a qu'un seul Dieu, tantôt qu'il y en a deux, répliquent nos adversaires, il faut en conclure que l'un et l'autre sont le même, tout à la fois Père et Fils.
---- L'Ecriture ne court aucun péril pour que votre raisonnement lui vienne en aide, afin d'empêcher qu'elle ne semble se contredire. Elle a ses motifs et se suffit à elle-même, soit qu'elle proclame l'unité de Dieu, soit qu'elle distingue le Père d'avec le Fils. Il est certain qu'elle nomme le Fils. Elle a pu déclarer à bon droit, et sans porter atteinte au Fils, que le Dieu qui a un Fils est un Dieu unique. En effet, celui qui étant lui-même unique, a un Fils, ne laisse pas d'exister en son propre nom, toutes les fois qu'il est nommé sans son Fils. Or, il est nommé sans son Fils toutes les fois qu'il est désigné principalement comme la première personne, qu'il fallait établir avant le nom de Fils, parce que la paternité doit être connue d'abord, et que le Fils n'est nommé qu'après le Père. «Par conséquent, Dieu le Père est le Dieu unique, et il n'y en a pas d'autre que lui.» Quand il conclut ainsi, il ne nie pas le Fils, il nie seulement qu'il y ait un autre Dieu que lui, parce que le Fils n'est pas un autre Dieu que le Père.
Enfin examine ce qui suit ces déclarations, et tu reconnaîtras que la plupart de leurs dispositions s'appliquent à ceux qui fabriquent et honorent les idoles, afin que l'unité de la divinité bannisse la multitude des faux dieux, mais l'unité toutefois qui a un Fils aussi indivisible et inséparable du Père qu'il est exprimé dans le Père, quoiqu'il n'ait pas été nommé. Il y a mieux: si Dieu l'avait nommé, il l'eût séparé de lui-même en disant: Il n'y en a pas d'autre que moi, excepté mon Fils. Excepter son Fils, c'eût été le déclarer différent. Supposons que le soleil tienne ce langage: Je suis le soleil, d'autre que moi, il n'y en a pas, excepté mon rayon; n'aurais-tu pas crié à la contradiction; comme si le rayon n'était pas compris lui-même dans le soleil! Dieu proclama donc qu'il n'y avait pas d'autre Dieu que lui-même, soit à cause de l'idolâtrie des nations et d'Israël, soit à cause des hérétiques qui, de même que les nations se taillent des idoles de leurs mains, se forgent aussi en paroles un Dieu et un Christ chimérique. Ainsi, quand il rendait témoignage à son unité, le Père agissait dans les intérêts du Fils, afin que l'on ne crût pas que Jésus-Christ était venu au nom d'un autre Dieu, mais au nom de celui qui avait dit d'avance: «Je suis Dieu, et il n'y en a pas d'autre que moi,» et qui se déclare le Dieu unique, mais dans la société du Fils avec qui seul il a étendu les deux.