3.
Il y a une certaine vie de l'homme toute dans les sens, et livrée aux joies de la chair; elle se défend contre toute incommodité corporelle et poursuit le plaisir. La félicité qu'on y trouve ne dure qu'un temps; c'est une nécessité de commencer, par cette sorte de vie; on s'y maintient par la volonté. C'est dans cette vie-là qu'est jeté l'enfant qui vient de naître; il en évite les peines, autant qu'il le peut, et en cherche les douceurs ; il n'est capable de rien de plus. Mais, parvenu à l'âge où s'éveille en lui la raison, il peut, Dieu aidant sa volonté, choisir une autre vie, dont la joie est tout en esprit, dont la félicité est intérieure et éternelle. Car il a été donné à l'homme une âme raisonnable, mais l'important pour lui est l'usage de sa raison, la direction que par elle il saura imprimer à sa volonté. Se tournera-t-il vers les biens de la nature visible et inférieure, ou vers les biens de la nature invisible et supérieure? c'est-à-dire, jouira-t-il du corps et du temps, ou bien jouira-t-il de Dieu et de l'éternité? L'âme humaine, en effet, se trouve placée comme dans un milieu, ayant au-dessous d'elle le monde des corps, et au-dessus son propre Créateur et le Créateur des choses corporelles.