3.
Dans ce livre, Pélage n'entend par la grâce de Dieu que la nature par laquelle nous sommes formés avec le libre arbitre. Quant à la grâce que la sainte Ecriture nous marque en d'innombrables endroits, nous apprenant que c'est elle qui nous justifie, c'est-à-dire qui fait qu'on devient juste et que la miséricorde de Dieu nous aide à accomplir, et à accomplir parfaitement toute bonne oeuvre (et les prières des saints nous le montrent clairement aussi, car les saints demandent au Seigneur de pouvoir observer ce que le Seigneur commande) quant à cette grâce, dis-je, non-seulement Pélage n'en parle pas, mais il avance beaucoup de choses contraires. Il affirme en effet et soutient fortement que la nature humaine, par le seul libre arbitre, suffit à l'accomplissement des oeuvres de justice et à l'observance de tous les commandements de Dieu. En lisant ce livre, qui donc ne voit pas combien la grâce de Dieu y est combattue, cette grâce dont l'Apôtre dit : « Malheureux homme que je suis ! qui me délivrera du corps de cette mort? La grâce de Dieu par Jésus-Christ Notre-Seigneur 1? » Il ne s'y trouve plus de place pour le secours divin en vue duquel nous devons dire en priant : « Ne nous induisez pas en tentation 2 ? » Si tout peut s'accomplir sans l'aide de Dieu avec le seul pouvoir de la volonté, c'est sans raison que le Seigneur aura dit à l'apôtre Pierre : « J'ai prié pour toi de peur que ta foi ne défaille 3. »