42.
« Mais, dit-on, en ce qui touche les enfants que Dieu enlève de ce monde, il prévoit quelle eût été la conduite de chacun d'eux s'ils eussent vécu; il fait mourir sans baptême celui dont il sait que la vie eût été mauvaise, punissant en lui, non pas ce qu'il a fait mais ce qu'il devait faire de mal.» Si donc Dieu punit même le mal qui n'a pas été commis, nos adversaires reconnaîtront d'abord combien ils ont tort de promettre que les enfants morts sans baptême ne tomberont pas dans la damnation, puisqu'ils ne sont pas baptisés en vue du mal qu'ils auraient fait s'ils eussent vécu : ils seront damnés sans aucun doute en vue de cette vie mauvaise, si Dieu punit même le mal qu'on eût commis si on eût vécu. Ensuite, si Dieu accorde la grâce du baptême à ceux dont il sait d'avance la bonne vie, pourquoi ne les laisse-t-il pas dans une vie qu'ils auraient ornées de bonnes oeuvres? et pourquoi, parmi ceux qui reçoivent le baptême, y en a-t-il qui finissent par vivre fort mal et qui parfois vont jusqu'à l'apostasie? Si les péchés qui ne sont pas encore commis sont punis avec justice, pourquoi Dieu, sachant d'avance que nos premiers parents pécheraient, ne les a-t-il pas chassés du paradis, afin qu'ils ne profanassent point la sainteté de ce lieu ? Que sertit à l'homme d'être enlevé de bonne heure de ce monde, « de peur que 1e mal ne change son coeur et que la fausseté ne trompe son âme 1,» si Dieu punit ce qu'il doit faire quoiqu'il ne l'ait pas fait?, Enfin pourquoi Dieu n'accorde-t-il pas plutôt la ,grâce de la régénération baptismale à l'enfant qui va mourir et qui, s'il eût vécu, eût fait le mal, afin que les péchés qu'il devait commettre lui soient remis par le baptême ? Qui oserait soutenir que Dieu ne puisse pas effacer par le baptême ce qu'on prétend qu'il peut punir dans ceux qui ne le reçoivent pas?
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Sag. IV, 11. ↩