6.
Si pourtant malgré nous, malgré nos précautions, notre écrit venait à tomber entre les mains de ceux à qui nous ne voudrions pas le faire connaître, que nous resterait-il, sinon une tranquille résignation à la volonté de Dieu? Je ne devrais pas écrire à qui que ce soit ce que je voudrais toujours cacher. Car si, ce qu'à Dieu ne plaise, il arrive par accident ou par nécessité que je ne reçoive pas de réponse, sans aucun doute l'écrit que nous avons envoyé sera un jour publié. On ne le lira pas inutilement, parce que, si on n'y trouve pas la vérité que l'on cherche, on trouvera au moins ;comment on doit la chercher, et l'on y apprendra à ne pas affirmer témérairement ce qu'on ne sait pas. Les lecteurs de cet écrit apprendront aussi à consulter, quand ils pourront, avec une tendre charité et non avec une contention querelleuse, jusqu'à ce qu'ils découvrent ce qu'ils veulent, ou que l'inutilité des efforts de leur esprit ne leur fasse reconnaître qu'ils ne sauraient aller plus loin. Maintenant votre amitié est bien persuadée, je pense, que tant que je puis espérer la réponse de mon ami, je ne dois pas vous envoyer mon écrit. Mais ce n'est pas à cela que se borne votre désir; vous voulez aussi la réponse de celui que j'ai consulté; ah ! je vous l'adresserais volontiers si je l'avais. Vous me demandez, ce sont les propres expressions de votre lettre, « la claire démonstration que l'Auteur de la lumière m'a accordée pour prix de la vie que je mène; » peut-être n'appelez-vous pas mon oeuvre une consultation et une recherche, mais croyez-vous que je suis parvenu à la vérité; s'il en était ainsi, je vous l'enverrais. Mais je l'avoue, je n'ai pas trouvé encore comment l'âme tire son péché d'Adam (ce qu'il n'est pas permis de mettre en doute), sans tirer d'Adam lui-même son origine : c'est ce qu'il me faut étudier sérieusement et non pas résoudre légèrement.