16.
« Pour mieux répondre, dit cet homme, à ceux qui errent, il suffit de rappeler qu'avec le jeûne on peut ne pas profiter devant Dieu, mais que personne ne l'offense: or ne pas offenser Dieu, c'est profiter. » On ne parle ainsi que quand on ne sait pas ce qu'on dit. Il serait donc vrai que les païens, quand ils jeûnent, n'offensent pas Dieu ! Et si l'auteur n'entend appliquer ceci qu'aux chrétiens, ne serait-ce pas offenser Dieu que de jeûner le dimanche au grand scandale de toute l'Eglise répandue partout ? Cherchant encore inutilement dans l'Ecriture des passages à l'appui de son opinion, il dit: « C'est par le jeûne qu'Elie a mérité de monter en corps et de régner dans le paradis: » comme si le jeûne n'était pas recommandé par ceux même qui ne l'observent pas le samedi, ainsi qu'il l'est par ceux qui, cependant, ne jeûnent pas le dimanche, et comme si, quand Elie jeûna, le peuple de Dieu jeûnait même le jour du sabbat. Ce que j'ai répondu pour les quarante jours de Moïse s'applique pour les quarante jours d'Elfe. « Par jeûne, dit l'auteur, Daniel échappa à l'impuissante rage des lions; » comme s'il avait lu dans les livres saints que Daniel eût jeûné le samedi ou qu'il se fût trouvé un samedi avec les lions; mais nous lisons qu'il mangea au « milieu d'eux. « Par le jeûne, continue cet homme, la fidèle fraternité des trois enfants a été triomphante dans une prison de feu, et a mérité de recevoir et d'adorer le Seigneur dans des flammes hospitalières. » Ces exemples des saints ne servent de rien pour établir le jeûne à quelque jour que ce soit, encore moins le jeûne du samedi. Non-seulement on ne lit pas que les trois enfants aient été jetés dans la fournaise un samedi, mais on ne lit rien qui puisse nous apprendre qu'ils y soient restés assez longtemps pour jeûner; bien plus, ils y restèrent à peine une heure, qu'ils passèrent à chanter leur hymne: ils ne se promenèrent pas au milieu de ces flammes bénignes au delà de la durée de leur cantique. Mais peut-être que, dans la pensée du dissertateur, on jeûne du moment qu'on reste une heure sans manger; et, dans ce cas, il n'y aurait pas de quoi se fâcher contre ceux qui dînent le samedi, car le temps qui s'écoule jusqu'à l'heure du repas nous représente un plus long jeûne que celui qui eut lieu dans la fournaise.