6.
Pour n'en dire qu'un mot, qui ne voit que beaucoup de gens attachés à la défense de votre pouvoir ou de votre personne, quelles que soient leur fidélité envers vous et la sûreté de leurs services, désirent, par vous, arriver à ces biens qu'ils n'aiment pas, eux, aussi, selon Dieu, mais qu'ils aiment selon le monde? car vous, qui devriez dompter et modérer vos cupidités, vous êtes obligé de rassasier celles d'autrui. Cela ne peut se faire qu'avec beaucoup de choses qui déplaisent à Dieu, et l'ardeur de tant de désirs n'est pourtant pas satisfaite; il est plus facile de les refréner dans ceux qui aiment Dieu que de les assouvir dans ceux qui aiment le monde. C'est pourquoi la divine Ecriture nous dit : « N'aimez pas le monde, ni ce qui est dans le monde. Si quelqu'un aime le monde, il n'aime pas le Père, parce que tout ce qui est dans le monde est concupiscence de la chair, et concupiscence des yeux, et orgueil de la vie, ce qui ne vient point du Père, mais du monde. Or, le monde passe et sa concupiscence; mais celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternellement, comme Dieu lui-même demeure éternellement 1. » Pourrez-vous, sans faire ce que Dieu défend et vous exposer à ses menacés, pourrez-vous, je ne dis pas rassasier, ce qui ne se peut, mais contenter de quelque manière, en vue d'épargner de moindres maux, la concupiscence de tant d'hommes armés, dont la cruauté est redoutable? Que de débris amoncelés parleur cupidité violente ! Et que reste-t-il à prendre là où ils ont passé?
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I Jean, II, 15-17. ↩