1.
Je sens combien je parais dur, et c'est à peine si je me supporte moi-même, de ne pas envoyer à votre sainteté et de ne pas laisser partir mon fils, le diacre Lucille, votre frère. Mais lorsque, pour les besoins d'Eglises éloignées de vous, vous commencerez à vous séparer de quelques-uns de vos élèves les plus chers et les plus dignes d'être aimés, vous comprendrez de quelles peines intérieures je suis déchiré par l'absence d'amis qui me sont tendrement unis. Car, pour écarter votre pensée, les liens du sang qui vous attachent à Lucille ne sont pas plus forts que les liens d'amitié par lesquels Sévère et moi nous tenons l'un à l'autre 1, et cependant vous savez combien il m'arrive rarement de le voir. Ce n'est ni ma faute ni la sienne; mais nous préférons aux besoins de notre vie présente les besoins de l'Eglise notre mère, en vue du siècle futur qui doit nous réunir à jamais. Combien devez-vous mieux supporter, dans l'intérêt de l'Eglise notre mère, l'absence d'un frère avec lequel vous ne vous êtes pas nourri de l'aliment divin. aussi longtemps que moi avec mon cher compatriote Sévère ! C'est à peine, maintenant, s'il me parle de temps en temps dans de petites lettres, presque toutes remplies de soins et d'affaires d'autrui, et qui ne m'apportent aucune fleur de ces prairies où nous respirions ensemble les parfums du Christ.
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Sévère était né à Thagaste comme saint Augustin. Il occupait le siège de Milève. ↩