4.
Tous ceux qui nous épargnent ne sont pas nos amis, ni tous ceux qui nous frappent, nos ennemis. Les blessures d'un ami sont meilleures que les baisers d'un ennemi 1. Mieux vaut aimer avec sévérité que tromper avec douceur. Il est plus utile à celui qui a faim de lui ôter le pain si, tranquille sur sa nourriture, il néglige la justice, que de le lui rompre pour le séduire et le déterminer à l'iniquité. Celui qui lie un frénétique et qui secoue un léthargique, les tourmente tous les deux, mais il les aime tous les deux. Qui peut plus nous aimer que Dieu? Et cependant il ne cesse de mêler à la douceur de ses instructions la terreur de ses menaces. Les adoucissements par lesquels il nous console sont souvent accompagnés du cuisant remède de la tribulation ; il éprouve par la faim les patriarches même pieux et religieux 2; il poursuit par de sévères châtiments la rébellion de son peuple et ne délivre pas l'Apôtre de l'aiguillon de la chair, malgré sa prière trois fois renouvelée, pour achever la vertu dans la faiblesse 3. Aimons nos ennemis, parce que cela est juste; Dieu l'a ordonné pour que nous soyons les enfants de notre Père qui est aux cieux, qui fait luire son soleil sur les bons et les méchants, et fait pleuvoir sur les justes et les injustes 4. Mais tout en le louant de ces dons, songeons aux épreuves qu'il n'épargne pas à ceux qu'il aime.