2.
Je dirai donc pourquoi je ne suis pas allé vers vous, et par quels maux j'ai été privé d'un si grand bien ; non-seulement j'espère que vous m'accorderez mon pardon, mais j'espère aussi , par vos prières , obtenir la miséricorde de celui qui opère en vous ce qui fait,que vous vivez pour lui. Le peuple d'Hippone, à qui Dieu m'a donné pour serviteur, est presque tout entier si faible que la moindre tribulation suffit pour l'abattre; mais tel est aujourd'hui l'excès de son affliction 1 que, ne fût-il pas faible, il pourrait à peine en porter le poids sans succomber. A mon dernier retour, j'ai reconnu que mon absence avait été pour ce peuple un dangereux sujet de scandale; or, vous savez, vous dont la force m'est une joie dans le Seigneur, vous savez par quelle sagesse l'Apôtre a dit : « qui est faible sans que je le devienne avec lui ? Qui est scandalisé sans que je brûle 2? » D'ailleurs il y a bien des gens ici qui, ne nous épargnant pas dans leurs attaques, s'efforcent d'exciter centre nous ceux qui nous aiment et de faire entrer le démon dans leur âme. Or quand nous sommes ainsi poursuivis par ceux dont le salut nous occupe, leur grand dessein de vengeance est un désir de mourir, non dans le corps, mais dans l'âme où l'on sent une secrète odeur de sépulcre avant même que notre pensée ait pu découvrir que la vie n'est plus là. Vous pardonnerez, sans aucun doute, à ces sollicitudes; si vous m'en blâmiez et vouliez me punir, vous ne trouveriez rien de plus pénible à m'imposer que ce que je souffre, lorsque vous êtes à Thagaste et que je ne vous y vois pas. Mais, aidé par vos prières, dès que les obstacles qui maintenant me retiennent auront disparu , j'espère qu'il me sera donné d'aller vous joindre, en quelque lieu de l'Afrique que vous vous trouviez, si, comme je le crains, la ville où. je porte le fardeau de mes devoirs n'est pas digne de se réjouir avec nous de votre présence.