CHAPITRE XXII. ON DOIT VARIER LE DISCOURS PAR LES DIFFÉRENTS GENRES DE STYLE.
51. Loin d'être contraire aux règles, le mélange de ces divers genres de style, quand le goût: y préside, ne fait qu'introduire dans le discours une agréable variété. L'emploi trop prolongé d'un style uniforme soutient moins l'attention de l'auditeur. Mais le discours, si long qu'il soit, marche avec plus de grâce, si on passe d'un genre à un autre ; outre que chaque style revêt, dans la bouche d'un homme éloquent, une variété propre qui stimule sans cesse l'oreille de l'auditeur. Cependant, pour s'en tenir à un seul genre, le style simple se supporte plus longtemps que le style sublime. Plus il est nécessaire d'émouvoir l'auditeur pour l'entraîner, moins on doit le retenir dans cette émotion, quand elle est suffisamment produite. En voulant le surexciter davantage, il est à craindre qu'on ne détruise ce que l'éloquence avait déjà opéré. En descendant, par intervalles, au style simple, on remonte avec plus d'effet au sublime, en sorte que le discours se déroule comme la mer, dont les flots s'élèvent et s'abaissent tour à tour. Aussi quand on doit parler assez longtemps dans le genre sublime, il ne faut pas l'employer seul, mais le varier par le mélange des deux autres ; et le discours prendra le nom du genre qui y dominera.