27.
D'après quelques philosophes, l'âme possède naturellement le don de la divination. S'il en est ainsi, pourquoi l'âme n'est-elle pas toujours capable de lire dans l'avenir, quoiqu'elle le souhaite toujours? Dira-t-on que cette faculté doit être secondée pour entrer en exercice? Mais si elle a besoin d'une influence étrangère, la reçoit-elle d'un corps? Non évidemment. Il faut donc que cette influence vienne d'un esprit. Puis, comment s'exerce-t-elle? Se .passe-t-il dans le corps un certain mouvement capable d'en développer et d'en tendre les ressorts avec tant de force, que l'esprit comprend les images qu'il contenait à son insu au même titre qu'il y a en dépôt dans la mémoire une foule d'idées qu'on n'aperçoit pas? Faut-il dire que ces signes apparaissent sans avoir été conçus antérieurement ou qu'ils résident en quelque sorte dans l'esprit d'où ils jaillissent et deviennent visibles à la raison? Mais s'ils étaient renfermés dans l'âme en quelque sorte essentiellement, pourquoi ne les comprend-elle pas par voie de conséquence? En effet elle ne les comprend presque jamais. La raison aurait-elle besoin d'une influence étrangère pour saisir les images que lui livre l'esprit, comme l'esprit pour les découvrir en lui-même? L'âme peut-elle, sans que les liens corporels soient rompus ou élargis, prendre son essor et atteindre aux idées pures est-elle, dis-je, capable par ses seuls efforts de voir les images et même de deviner ce qu'elles ont d'intelligible ? Enfin saisit-elle les symboles tantôt par elle-même, tantôt par le concours d'un autre esprit? Quelle que soit la valeur de ces hypothèses, il ne faut en admettre aucune légèrement. Un point incontestable, c'est que les images aperçues par l'esprit dans la veille, le sommeil, la maladie, ne sont pas toujours un signe, tandis que dans le véritable ravissement, il serait étrange que ces images ne fussent pas des signes.