Edition
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De Virginibus Velandis
XI.
[1] Sed quod supra intermisimus ex parte subsecutae disputationis, ne cohaerentiam eius dispergeremus, nunc responso expungemus. Ubi enim gradum fiximus de apostoli absoluta definitione, omnem mulierem etiam omnis aetatis intelligendam, responderi ex diverso habebat, ergo a nativitate et a primo nomine aetatis virginem operiri oportere. [2] Non ita est autem, sed ex quo intelligere se coeperit et sensum naturae suae intrare et de virginis exire et pati novum illud, quod alterius aetatis est. [3] Nam et principis generis Adam et Eva quamdiu intellectu carebant, nudi agebant; at ubi de arbore agnitionis gustaverunt, nihil primum senserunt quam erubescendum; ita sui quique sexus intellectum tegmine notaverunt. [4] Sed etsi propter angelos velanda est, sine dubio ab ea aetate lex velaminis operabitur, a qua potuerunt filiae hominum concupiscentiam sui adducere et nuptias pati; ex illo enim virgo desinit, ex quo potest non esse. [5] Et ideo penes Israelem illicitum est ad virum tradere nisi post contestatam sanguine maturitatem; ita ante hunc indicem acerba res est. Igitur si tamdiu virgo, quamdiu acerba est, desinit virginem, cum matura cognoscitur, et ut non virgo iam legi applicatur sicut et nuptiis. [6] Et desponsatae quidem habent exemplum Rebeccae, quae, cum ad sponsum ignotum adhuc ignota perduceretur, simul ipsum cognovit esse, quem de longinquo prospexerat, non sustinuit dexterae colluctationem nec osculi congressionem nec salutationis communicationem, sed confessa quod senserat, id est spiritu nuptam, negavit virginem velata ibidem. O mulierem iam de Christi disciplina! ostendit enim etiam nuptias de aspectu et animo fieri quemadmodum stuprum. [7] Nisi quod etiam Rebeccam quidam adhuc velant, de ceteris vero, id est quae desponsatae non sunt, viderit aut parentum procrastinatio ex angustiis vel scrupulositate descendens, viderit et ipsum continentiae votum: nihil pertinet ad aetatem sua spatia currentem suaque debita maturitati luentem; alia in occulto mater, natura, et alius in latenti pater, tempus, filiam suam legibus suis maritarunt. [8] Aspice nuptam iam in illam tuam virginem, et animam expectatione[m] et carnem transfiguratione[m], cui tu secundum paras maritum: iam et vox obsolefacta est et membra completa sunt et pudor ubique vestitur et menses tributa defendunt, ac tu mulierem negas, quam muliebria pati dicis? [9] Si congressio viri mulierem facit, non tegantur nisi post ipsam nuptiarum passionem -- atquin etiam apud ethnicos velatae ad virum ducuntur --; si autem ad desponsationem velantur, quia et corpore et spiritu masculo mixtae sunt per osculum et dexteras, per quae primum resignarunt pudorem spiritu, per commune conscientiae pignus, quo totam condixerunt confusionem, quanto magis tempus illas velabit, sine quo sponsari non possunt et quo urgente sine sponsalibus virgines desinunt esse! [10] Tempus etiam ethnici observant, ut ex lege naturae iura sua aetatibus reddant; nam feminas quidem a duodecim annis, masculum vero a duobus amplius ad negotia mittunt, pubertatem in annis, non sponsalibus aut nuptiis decernentes; mater familiae vocatur, licet virgo, et pater familiae, licet investis. A nobis nec naturalia observantur, quasi alius sit deus naturae quam noster.
Übersetzung
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Du voile des vierges
XI.
Maintenant, achevons le sujet que nous avons ajourné précédemment pour entrer dans une question subsidiaire, afin de ne pas interrompre la liaison des idées. Quand nous avons établi que la définition de l'Apôtre était absolue, et que par « toute femme » il fallait entendre la femme, de quelqu'âge qu'elle fût, on pouvait me répondre de l'autre côté: Il faut donc voiler la vierge dès le moment de sa naissance et aussitôt qu'elle porte ce nom? Il n'en est rien. Cette loi n'oblige que celle qui commence à se connaître, à entrer dans la marque distinctive de sa nature, à sortir de l'enfance, et à souffrir ce quelque chose de nouveau qui appartient à un autre âge. En effet, nos premiers pères, Adam et Eve, ont été nus tant qu'ils manquèrent de la connaissance de leur nature. Mais du moment qu'ils eurent goûté du fruit de l'arbre de la science, le premier sentiment qu'ils éprouvèrent fut celui de la honte. Aussi couvrirent-ils l'un et l'autre cette chair qu'ils avaient commencé de connaître.
Mais si c'est à cause des anges qu'il faut voiler la femme, il n'en faut pas douter, l'obligation du voile commencera pour elle le jour où elle peut exciter la convoitise des hommes, et devenir propre au mariage. Elle cesse d'être vierge aussitôt qu'elle peut ne l'être plus. Voilà pourquoi chez les Israélites il était défendu de marier une fille avant que sa maturité fût attestée par des signes naturels; jusqu'à ce témoignage, c'est un fruit sans maturité. Si donc elle demeure vierge tant qu'elle n'est pas propre au mariage, elle cesse d'être vierge aussitôt qu'elle est reconnue propre au mariage; alors, n'étant plus vierge, la loi lui est applicable comme le mariage.
Les fiancées ont l'exemple de Rébecca, qui, conduite à l'époux qu'elle ne connaissait pas plus qu'il ne la connaissait, à peine informée que c'était lui qu'elle avait aperçu de loin, n'attendit point qu'il lui serrât la main, qu'il lui donnât un baiser, qu'il lui rendît son salut, mais confessant ce qu'elle avait ressenti, c'est-à-dire qu'elle était déjà son épouse par l'esprit, déclara qu'elle n'était plus vierge en se voilant aussitôt. O femme qui entrait bien dans la discipline du Christ! Elle montre que le mariage, ainsi que la corruption, sont dans les yeux et dans le cœur.
Quelques-uns, il est vrai, voilent encore Rébecca. Quant aux autres, c'est-à-dire celles qui ne sont pas fiancées, qu'importent les délais des parents qui ajournent le mariage, soit par indigence, soit pour trouver un parti convenable? Qu'importe le vœu même de continence? Rien ne peut empêcher l'âge de suivre son cours et de payer sa dette à la maturité. La nature qui est une seconde mère cachée, le temps un autre père que l'on ne connaît pas, ont marié une fille d'après les lois qui leur sont propres. Regardez donc votre prétendue vierge comme déjà mariée: son esprit l'est par l'attente, sa chair l'est par sa transformation: l'époux que vous lui destinez n'est que le second.
Voyez-la, en effet; sa voix s'est développée; ses membres ont acquis leur perfection; un vêtement de pudeur est jeté sur elle; chaque mois paie son tribut; soutenez encore qu'elle n'est pas femme celle qui éprouve tous les accidents de la femme. S'il est vrai que ce soit la consommation du mariage qui fasse la femme, qu'on ne les voile qu'après le mariage. Mais voilà qui est mieux. Chez les païens eux-mêmes on les conduit voilées à leurs époux. Si elles doivent être voilées aussitôt après qu'elles sont mariées, parce qu'elles sont mêlées à l'homme et de corps et d'esprit, par le baiser nuptial, par la main qu'elles ont donnée, en témoignage de la pudeur de l'esprit qu'elles résignaient; enfin par ce gage commun de la conscience en vertu duquel elles ont souscrit au complet abandon d'elles-mêmes; à plus forte raison devront-elles être soumises au voile par le temps sans lequel elles ne peuvent devenir épouses, et dont le cours, sans même attendre le mariage, les met hors du nombre des vierges. Les païens eux-mêmes observent le temps, afin de rendre, conformément aux lois de la nature, à chaque âge ses droits. Ils ont l'habitude d'employer aux affaires les femmes à douze ans, les hommes deux ans après, déterminant ainsi la puberté par les années et non par les fiançailles ou le mariage. Chez eux, une fille, toute vierge qu'elle est, peut avoir le nom de mère de famille, de même qu'un homme peut être père de famille sans être marié. Pour nous, nous n'observons pas même ces lois de la nature, comme si le Dieu de la nature n'était pas le nôtre.