20.
Ceci était figuré, quand Jacob mit une pierre sous sa tête et s’endormit1. Le patriarche Jacob avait donc mis une pierre sous sa tête; et pendant qu’il dormait sur cette pierre, il vit le ciel s’ouvrir, et une échelle qui allait du ciel en terre, et des anges qui montaient et qui descendaient; après cette vision il s’éveilla, oignit la pierre et s’en alla. Dans cette pierre il vit le Christ, et pour cela il l’oignit. Voyez donc depuis combien le Christ était prédit. Que signifie cette onction donnée à une pierre, surtout chez les patriarches qui adoraient un seul Dieu? Il fit cela en figure, car après l’avoir fait il n’y revint pas d’une manière continue pour y adorer et y offrir des sacrifices. C’était la figure d’un mystère, et non l’ouverture d’un sacrilège. Voyez quelle pierre : «La pierre que les architectes ont repoussée est devenue la ce pierre angulaire2 » .Et parce que le Christ est la tête de l’homme, cette pierre fut mise à la tête de Jacob. Voyez donc ici un grand mystère. Le Christ est la pierre; « une pierre ce vivante, rejetée par les hommes », nous dit saint Pierre, ce mais choisie de Dieu3 ». Et la pierre était à la tête, parce que le Christ est la tête de l’homme4. Cette pierre est ointe, parce que c’est de l’onction que vient le nom de Christ. Et la révélation du Christ nous montre des échelles qui vont de la terre au ciel, ou du ciel à la terre, et des anges qui montent et qui descendent5. Nous comprendrons mieux cette figure quand nous aurons cité une parole du Seigneur dans l’Evangile. Vous savez que Jacob est le même qu’Israël6. Or, quand il lutta et eut l’avantage sur l’ange, quand il reçut la bénédiction de celui qu’il avait vaincu, son nom fut changé, il s’appela Israël; ainsi le peuple d’Israël prévalut contre le Christ qu’il fit crucifier, et pourtant dans la personne de ceux qui crurent au Christ, il reçut la bénédiction de celui qu’il avait vaincu. Mais il y en eut beaucoup pour ne pas croire, de là vient que Jacob fut boiteux. Il fut donc béni et boiteux; béni dans ceux qui crurent, car nous savons qu’un grand nombre dans ce peuple embrassèrent la foi, boiteux dans ceux qui demeurèrent incrédules. Et comme le nombre des incrédules fut plus grand que celui des croyants, il est dit que l’ange, pour le rendre boiteux, le frappa sur l’étendue de la cuisse. Que désignait cette étendue de la cuisse, sinon sa postérité nombreuse? Voyez donc ces échelles dans l’Evangile; en voyant Nathanaël, « voilà », dit le Seigneur, « un vrai ce Israélite, sans déguisement7 ». C’est là ce qui est dit de Jacob : « Et Jacob, qui était sans déguisement, demeurait au logis8 ». Voilà ce que rappelait le Seigneur, en voyant Nathanaël sans déguisement, et qui appartenait à cette postérité, à cette nation. «Voilà», dit-il, « un véritable Israëlite, sans déguisement ». il l’appela donc Israélite sans déguisement à cause de Jacob. Alors Nathanaël : « D’où me connaissez-vous? » Et le Seigneur: « Je t’ai vu quand tu étais sous le figuier » ; c’est-à-dire , quand tu faisais partie de ce peuple établi sous la loi qui le couvrait comme d’une ombre charnelle, c’est là que je t’ai vu. Qu’est-ce à dire : C’est là que je t’ai vu? Là que je t’ai pris en pitié. Celui-ci se souvenant qu’il avait été vraiment sous un figuier, et s’étonnant que Jésus-Christ le sût, parce qu’il croyait n’avoir été vu de personne, lui fit cette confession : « Vous êtes le Fils de Dieu, vous êtes le Roi ce d’Israël ». Qui parla ainsi? Celui qui venait de s’entendre dire qu’il était un vrai Israélite, et qu’il n’y avait en lui aucun déguisement. Et le Seigneur : «Parce que je t’ai dit : Je t’ai vu sous le figuier, tu as cru, mais ce tu verras de plus grandes choses ». Il parle à Israël, à Jacob, à celui qui avait mis une pierre sous sa tête. « Tu verras de plus grandes choses ». Quelles plus grandes choses? Car cette pierre est déjà posée sous sa tête. « En vérité, je vous le déclare, vous verrez le ciel ouvert, et les anges de Dieu ce montant et descendant sur le Fils de ce l’homme9 ». Ah ! que les anges de Dieu montent et qu’ils descendent par ces échelles, et que cela se fasse dans l’Eglise. Les anges de Dieu sont les messagers de la vérité; qu’ils montent et qu’ils considèrent : « Au commencement était le Verbe, et le Verbe était ce en Dieu, et le Verbe était Dieu ». Qu’ils descendent et qu’ils considèrent ce que le « Verbe s’est fait chair, et qu’il a habité parmi nous10 ». Qu’ils montent pour élever les forts; qu’ils descendent pour nourrir les faibles. Voyez Paul qui monte: « Que nous ce soyons hors de nous-mêmes, c’est pour Dieu ». Voyez-le qui descend : «Que nous ce soyons plus calmes, c’est pour vous11 ». Voyez-le monter encore : « Nous prêchons la ce sagesse de Dieu aux parfaits ». Voyez-le redescendre : « Je vous ai donné du lait et non de la nourriture12 ». Voilà ce qui se fait dans l’Eglise, les anges de Dieu montent et descendent sur le Fils de l’homme; car le Fils de l’homme est en haut, c’est vers lui comme vers le chef, que s’élèvent les coeurs. Le Fils de l’homme ou son corps est aussi en bas; ses membres sont donc ici-bas, sa tête est en haut; on monte vers la tête, on descend vers les membres. Le Christ est au ciel, et le Christ est sur la terre. S’il n’était que dans le ciel et non sur la terre, d’où viendrait cette voix : «Saul, Saul, pourquoi me persécuter13 ? » Car, dans le ciel, qui pouvait le molester? Personne assurément, ni les Juifs, ni Saul, ni le diable tentateur; nul dans le ciel ne peut lui nuire; mais telle est la liaison des membres dans le corps humain, que la langue réclame quand le pied est blessé.