15.
« Créez en moi,, Seigneur, un coeur nouveau ». « Créez » ; le Prophète n’a point voulu dire par là: Faites en moi quelque chose de nouveau; mais comme il priait avec repentir, comme il était coupable d’un crime, et qu’avant ce crime il était plus innocent, il nous montre ainsi la valeur de cette expression : « Créez. Et renouvelez au fond de mon âme l’esprit de droiture ». Mon crime, dit-il, avait détruit et courbé la droiture de mon esprit. Il dit dans un autre psaume: « Ils ont, courbé mon âme1 ». Et quand l’homme se penche vers les convoitises du temps, il se courbe en quelque sorte; quand il s’élève aux biens d’en haut, de manière à trouver la douceur en Dieu, son coeur devient droit. « Combien est bon le Dieu d’Israël, pour ceux « qui ont le coeur droit2 ! » Donc, mes frères, écoutez. Souvent Dieu châtie de ses péchés en cette vie l’homme auquel il pardonne pour l’autre vie. David lui-même, à qui Dieu avait dit par son Prophète : « Votre péché vous est remis3 », dut subir les châtiments dont Dieu l’avait menacé à cause de sa faute. Son fils Absalon lui fit une guerre sanglante et le réduisit à d’humiliantes extrémités4. Il marchait dans la douleur, dans l’affliction et le mépris, tellement soumis à Dieu qu’il reconnaissait sa justice dans ces traitements, et confessait qu’il ne souffrait rien qu’il n’eût mérité. Déjà son coeur était redressé, et Dieu ne lui déplaisait point. Il entendit patiemment un homme qui l’injuriait et lui jetait à la face des imprécations5, un homme qui se déclarait son ennemi, et marchait avec les soldats de son fils rebelle. A ces malédictions jetées au roi, un des compagnons de David voulut courir sur cet insolent et le tuer; mais David le retint. En quels termes? « C’est Dieu», dit-il, « qui l’a envoyé pour me maudire ». Il reconnaît donc sa faute, il en approuve le châtiment, il ne cherche point sa propre gloire; il bénit le Seigneur du bien qu’il trouve en lui-même, il bénit le Seigneur des maux qu’il endure, il bénit le Seigneur en tout temps; la louange du Seigneur est toujours en sa bouche6. Tels sont les hommes au coeur droit: bien différents de ces hommes dépravés qui se croient justes et Dieu pervers; qui jubilent quand ils font le mal ; qui blasphèment quand ils souffrent; qui sous le fouet de la tribulation s’écrient dans leur âme dépravée : Dieu, que t’ai-je fait? En vérité, ils n’ont rien fait pour Dieu, ils ont tout fait pour eux-mêmes: « Renouvelez dans mes entrailles d’esprit de droiture ».
