2.
Voici le titre du psaume: « A David, pour la fin, pour ceux qui doivent changer1 ». Il faut entendre par là changer avec avantage, car on peut changer en pire ou en mieux. Adam et Eve devinrent pires; mais ceux qui s’éloignent d’Adam et d’Eve, pour s’attacher à Jésus-Christ, deviennent meilleurs : « De même en effet que la mort est entrée par un seul homme, c’est aussi par un seul homme que nous vient la résurrection : et de même qu’Adam est pour tous une cause de mort, le Christ sera pour tous une source de vie2». Adam, tel que Dieu l’avait fait, a changé cet état contre l’état bien inférieur de son iniquité; mais les fidèles échangent l’état que leur a fait l’iniquité, contre l’état supérieur de la grâce. Nous changer en mal, c’est l’effet de notre iniquité; nous changer en mieux, ce n’est point l’effet de notre justice, mais bien de la grâce de Dieu. C’est donc à nous qu’il faut attribuer notre changement en mal, et c’est Dieu qu’il faut bénir de notre changement en bien. Ce psaume est donc: « Pour ceux qui doivent changer ». Mais d’où a pu venir ce change. ment, sinon de la passion du Christ? Le mot Pâques signifie en latin passage; car Pâques n’est pas un mot grec, mais bien un mot hébreu. Dans la langue grecque, il a le sens de passion, puisque pasxein signifie souffrir : mais à s’en tenir à l’expression hébraïque, on trouve un autre sens. Pâques signifie donc passage. C’est le sens que lui donne saint Jean, qui s’exprime ainsi à propos de la cène que célébra le Christ, la veille de sa passion, et dans laquelle il institua le sacrement de son corps et de son sang : « Quand vint pour Jésus l’heure de passer de ce monde à son Père ». Il nous montre donc le passage de la pâque. Mais si celui qui était venu pour nous n’avait passé de ce monde à son Père, comment pourrions-nous y passer d’ici-bas, nous qui ne sommes point descendus pour relever quoi que ce soit , mais qui sommes tombés? Pour lui, il n’est point tombé, mais il est descendu afin de relever ce qui était tombé. Pour lui comme pour nous, c’est donc un passage que d’aller de cette vie à son Père, de ce monde au royaume des cieux, d’une vie pénible à la vie sans fin, d’une vie terrestre à la vie céleste, d’une vie corruptible à la vie incorruptible, d’une vie d’angoisses à une perpétuelle sécurité. «Pour ceux qui changeront », voilà donc le titre du psaume. Mais la cause de notre changement, ou la passion de Notre-Seigneur, nos plaintes dans ces douleurs, voilà ce qu’il nous faut examiner, ce qu’il faut reconnaître, afin de gémir, nous aussi; mais cette attention, cette reconnaissance, ces gémissements doivent nous faire changer, afin que s’accomplisse pour nous le titre du psaume : « Pour ceux qui seront changés3 ».