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Œuvres Augustin d'Hippone (354-430) Discours sur les Psaumes
DISCOURS SUR LE PSAUME LXVIII.
PREMIER DISCOURS SUR LE PSAUME LXVIII.

3.

« Sauvez-moi, ô Dieu, parce que les eaux pénètrent jusqu’à mon âme1 ». Ce grain est aujourd’hui méprisé, parce qu’il ne semble pousser que d’humbles cris. Au jardin il est submergé, et le monde un jour doit admirer la majestueuse étendue de cette plante dont le germe a été méprisé par les Juifs.

Considérez, en effet, ce grain de sénevé, chétif, noirâtre et tout à fait méprisable, afin de voir comment se vérifie le mot du Prophète « Nous l’avons vu, et il n’avait ni apparence ni beauté2 ». Il se plaint que les eaux pénètrent jusqu’à son âme : parce que ces foules tumultueuses, désignées sous le nom des eaux, ont prévalu sur le Christ au point de Je faire mourir. Elles ont eu la puissance sur lui jusqu’à le mépriser, le saisir, le garrotter, l’insulter, le souffleter, lui cracher au visage. Jusqu’à quel point encore? jusqu’à le mettre à mort. Donc «les eaux ont submergé jusqu’à son âme ». Car il appelle son âme, cette vie, et c’est jusque-là que peut s’avancer la fureur de ses ennemis. Mais l’auraient-ils pu, si lui-même ne l’eût permis? Pourquoi donc pousser des cris comme s’il souffrait malgré lui, sinon parce que le chef est pour nous la figure des membres? Pour lui, il a souffert, parce qu’il l’a voulu; mais les martyrs ont souffert, quand même ils ne l’eussent point voulu. Voici, en effet, comment le Sauveur prédit à Pierre sa passion : « Dans ta vieillesse, lui dit-il, un autre te ceindra et te conduira où tu ne voudras point3 ». Quel que soit notre désir d’être unis au Christ , nous ne voudrions pas mourir néanmoins; et si nous souffrons volontiers ou du moins avec patience, c’est qu’il n’y a point d’autre passage par lequel nous puissions nous unir au Christ. Si nous pouvions par quelqu’autre moyen aller au Christ, ou à la vie éternelle, qui voudrait mourir? Saint Paul, exposant quelque part notre nature intime, ou cette union de l’âme et du corps, et cette familiarité mutuelle que fait naître l’attachement, l’intime liaison, dit que nous avons dans le ciel une demeure éternelle, que la main de l’homme n’a point faite : c’est-à-dire l’immortalité qui nous est préparée, et dont nous serons revêtus à la fin du temps, quand nous ressusciterons d’entre les morts; et il ajoute : « Notre désir sera, non pas d’en être dépouillés, mais de l’avoir comme un second vêtement, en sorte que ce qu’il a de mortel soit absorbé par la vie4». Si cela était possible, nous dit-il, nous voudrions devenir immortels, nous voudrions que l’immortalité nous arrivât, et nous changeât dès maintenant tels que nous sommes, afin que notre mortalité actuelle fût absorbée par la vie, que notre corps ne passât point par la mort, pour ressusciter à la fin des temps. En vain donc nous passons du mal au bien, le passage n’en a pas moins son amertume; il a de ce fiel que les Juifs donnèrent au Seigneur dans sa passion, tout ce qui nous fait souffrir a de cette âcreté, symbole de ceux qui l’abreuvèrent de vinaigre5. C’était donc nous qu’il figurait d’avance, qu’il personnifiait en lui-même, quand il dit: « Sauvez-moi, ô Dieu, car les eaux submergent jusqu’à mon âme ». Ceux qui l’ont persécuté ont même pu le tuer, mais ils n’auront plus aucun pouvoir sur lui. Car le Seigneur nous a prémunis d’avance, quand il a dit : « Ne craignez point ceux qui tuent le corps, et n’ont plus rien à vous faire; mais craignez celui qui peut précipiter l’âme et le corps dans l’enfer6 ». Plus notre crainte est grande, et moins nous méprisons les biens médiocres; plus nous désirons l’éternité, plus nous méprisons les biens du temps. Ici-bas nous savourons jusqu’aux délices passagères, et les tribulations même d’un moment nous sont amères. Mais qui ne boirait à la coupe des tribulations passagères, par crainte du feu éternel; et qui ne mépriserait les délices d’un moment, en espérant les délices de la vie éternelle? Crions donc au Seigneur, afin qu’il nous délivre de cette vie, de peur que dans l’accablement nous ne cédions à l’iniquité, et ne soyons réellement submergés « Sauvez-moi, ô Dieu, car les eaux vont jusqu’à submerger mon âme ».


  1. Ps. LXVIII, 2. ↩

  2. Isaïe, LIII, 2.  ↩

  3. Jean, XXI, 18.  ↩

  4. II Cor. V, 1, 4. ↩

  5. Matth. XXVII, 31. ↩

  6. Id. X, 20. ↩

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