9.
Voilà brièvement, mes bien-aimés, les instructions du psaume, dans cette solennité des martyrs ; ainsi comprenons que les martyrs ont enduré une douleur corporelle;1 mais nous, de quelque paix que nous jouissions, il nous est nécessaire de subir une tribulation spirituelle ; il faut que parmi les scandales, et l’ivraie, et la paille, cette masse qui est l’Eglise exhale les gémissements, jusqu’à ce que vienne la moisson, jusqu’à ce que vienne le vanneur, jusqu’au jour où tout sera vanné une dernière fois, afin que le froment soit séparé de la paille, et placé dans les greniers2. Mais en attendant, crions vers le Seigneur : « Je suis pauvre, indigent;ô Dieu, secourez-moi. Seigneur, vous êtes mon soutien, ne tardez pas ». Qu’est-ce à dire: «Ne tardez point ? » Beaucoup disent: Le Christ ne viendra de longtemps. Eh quoi donc! parce que nous lui disons : Ne tardez point, viendra-t-il avant le moment qu’il a fixé? Quel est le sens de ce voeu : « Ne tardez point? » Que son avènement ne me paraisse point trop tardif, Il vous paraît bien éloigné, mais il ne paraît pas éloigné à Dieu pour qui un millier d’années n’est qu’un jour, ou trois heures de veille3. Si tu n’as la patience, ce temps te paraîtra long, et s’il te paraît long, tu te détacheras de Dieu, tu ressembleras à ceux qui se fatiguèrent dans la solitude, et qui s’empressèrent de demander à Dieu ces délices qu’il leur réservait dans la patrie ; et comme ils ne trouvaient point dans le voyage ces jouissances qui les eussent peut-être corrompus, ils murmurèrent contre Dieu, et retournèrent de coeur en Egypte4: le corps en était sorti, le coeur y retournait, Loin de toi, ah ! loin de toi ces sentiments. Crains la parole du Seigneur qui dit : « Souvenez-vous de l’épouse de Luth5 ». Elle était en chemin, délivrée de Sodome, elle regarde en arrière ; elle demeura à l’endroit où elle avait regardé : elle fut changée en statue de sel6, afin de te donner la sagesse. C’est une leçon qui t’est donnée, afin que tu aies plus de courage, et que tu ne demeures pas follement en chemin. Considère celui qui y demeure, et va plus loin; considère celui qui regarde en arrière, et avec Paul, avance. toi vers celui qui est devant toi. Que signifie, ne pas regarder en arrière ? « J’oublie », répond-il. « Ce qui est derrière moi ». Alors tu poursuivras la palme à laquelle tu es appelé d’en haut, et dont tu te glorifieras plus tard. Car le même Apôtre nous dit : « Il ne me reste qu’à attendre la couronne de justice, que le Seigneur, comme un juste juge, me donnera en ce grand jour7 » .