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Œuvres Augustin d'Hippone (354-430) Discours sur les Psaumes
DISCOURS SUR LE PSAUME LXXV.

1.

Les Juifs, dont la haine pour Notre-Seigneur Jésus-Christ est connue partout, tirent un sujet de vanité du psaume que nous venons de chanter. « Dieu est connu dans la eu Judée », nous disent-ils, « son nom est grand en Israël1 » : ils reprochent aux Gentils de ne point connaître le Seigneur, et se font gloire d’être les seuls pour le connaître; car si le Prophète s’écrie : Dieu est « connu dans la Judée », il est donc inconnu ailleurs. Il est vrai que Dieu est connu dans la iodée, si nous comprenons bien ce qu’est la Judée. Et nous aussi, nous avançons qu’à moins d’être dans la Judée, nul ne peut connaître Dieu. Que dit néanmoins l’Apôtre ? « Le Juif est celui qui l’est intérieurement, qui est circoncis de coeur selon l’esprit et non selon la lettre2 ». Les Juifs ont donc reçu la circoncision de la chair, et il y a des Juifs circoncis dans la chair, d’autres circoncis dans le coeur. Nos pères, saints pour la plupart, avaient la circoncision de la chair, comme signe de leur foi, et la circoncision du coeur, comme l’effet de leur fol. Voilà que leurs enfants ont dégénéré de leur piété; ils ne font valoir que leur nom et oublient leurs oeuvres; fils dégénérés de leurs pères, ils sont Juifs selon la chair, et païens de coeur. Car on appelle Juifs ceux qui sont nés d’Abraham, qui eut pour fils Isaac, duquel est né Jacob, qui eut pour fils les patriarches, et de ces douze patriarches est venu le peuple entier des Juifs. Mais ce nom de Juifs ou Judéens leur vient spécialement de Juda, l’un des douze fils de Jacob, patriarche comme les douze, dont la postérité règna sur le peuple des Juifs. Car ce peuple était divisé en douze tribus selon le nombre des douze fils de Jacob: ces tribus sont en quelque sorte des curies, des sociétés séparées. Ce peuple avait donc douze tribus, et parmi ces douze tribus, celle de Juda qui donnait des rois, et celle de Lévi qui donnait des prêtres. Mais les prêtres occupés au service du temple n’avaient aucune part dans la terre3, et néanmoins cette terre devait être divisée en douze parts; l’exception que l’on faisait en faveur de la tribu de Lévi, à cause de sa dignité, eût réduit à onze les portions de cette terre, si les deux fils de Joseph n’étaient venus compléter le nombre douze. Ecoutez comment cela se fit. Joseph était un des douze fils de Jacob; c’est celui-là que ses frères vendirent pour l’Egypte, et que sa chasteté porta au comble des honneurs, parce que Dieu bénit toutes ses actions ; lui qui recueillit ses frères et son père, exténués par la faim, et qui venaient en Egypte chercher du pain. Ce Joseph eut deux fils, Ephraïm et Manassé. Jacob, en mourant, déclara qu’il adoptait ses deux petits fils, et dit à Joseph « Ceux qui naîtront à l’avenir, seront vos enfants; ceux-ci sont à moi, ils partageront la terre avec leurs frères4». Or, cette terre promise n’était encore ni échue à ce peuple, ni divisée; mais il parlait ainsi par l’esprit de prophétie. Avec les deux fils de Joseph, on compléta donc le nombre de douze, car alors on arrivait à treize ; puisque Joseph fournissait deux tribus, il y avait alors treize tribus. Si donc nous exceptons du partage la tribu de Lévi, tribu sacerdotale, occupée au service du temple, vivant de la dîme qu’elle recevait des tribus qui avaient une part dans les terres, nous retrouvons le nombre douze. Dans ces douze, c’était la tribu de Juda qui donnait des rois. Il est vrai que, tout d’abord, le roi Saül fut tiré d’une autre tribu5, mais il fut réprouvé comme un mauvais roi; vint alors David, de la tribu de Juda, et ce fut sa race, dans la tribu de Juda, qui donna des rois6, Voici ce qu’avait dit Jacob lorsqu’il bénissait ses enfants « Le prince ne sortira point de Juda, ni le chef de sa postérité, jusqu’à ce que vienne celui à qui est faite la promesse7». Or, Notre-Seigneur Jésus-Christ est de la tribu de Juda; car, ainsi que le dit l’Ecriture, et que vous venez de l’entendre, il est né de Marie, «dans la famille de David8». Mais dans sa divinité qui le rend égal à son père, Notre-Seigneur Jésus-Christ est non-seulement avant les Juifs, mais avant Abraham9, non-seulement avant Abraham, mais avant Adam; non-seulement avant Adam,mais avant le ciel et la terre, et avant les siècles « Car tout a été fait par lui, et rien n’a été fait sans lui10». Telle était donc la prophétie de Jacob : « Le Prince ne sortira point de la famille de Juda, ni le chef de sa postérité, jusqu’à ce que vienne celui qui a reçu la promesse11 » : parcourons les siècles, et nous trouverons que les Juifs ont toujours eu des rois de la tribu de Juda, d’où leur est venu ce nom de Juifs; qu’ils n’ont eu aucun roi étranger avant cet Hérode, qui gouvernait quand le Sauveur vint au monde «. Avant lui tous les rois étaient de la tribu de Juda, mais jusqu’à celui qui avait reçu la promesses. Aussi à l’avènement du Sauveur, le royaume des Juifs fut détruit et leur fut enlevé. Ils n’ont plus de royaume aujourd’hui, parce qu’ils ne veulent point reconnaître le véritable roi. Voyez, mes frères, s’ils doivent porter encore le nom de Juifs, ou plutôt, vous comprenez que ce nom ne leur convient plus. Car ils ont eux-mêmes abjuré ce nom, au point qu’ils ne méritent plus ce nom de fils de Juda que selon la chair. Où donc ont-ils abjuré ce nom? Ils ont blasphémé, ils ont sévi contre le Christ, c’est-à-dire contre la race de Juda, le sang de David. Pilate leur dit : « Faut-il crucifier votre roi ? » Ils répondent : « Nous n’avons d’autre roi que César12». O peuple, qui portes le nom de Juda, tu ne l’as plus; si tu n’as d’autre roi que César, le prince n’est donc plus en Juda : il est donc venu « celui qui a reçu la promesse ». Ceux-là sont plus véritablement fils de Juda, qui de Juifs sont devenus chrétiens: quant aux fils de Juda qui n’ont pas cru au Christ, ils ont mérité de perdre jusqu’à leur nom. La véritable Judée est donc l’Eglise qui croit en ce roi, issu de la tribu de Juda. par la Vierge Marie : qui croit en celui dont l’Apôtre parlait tout à l’heure dans sa lettre à Timothée : « Souvenez vous que Notre-Seigneur Jésus-Christ, de la race de David, est ressuscité selon l’Evangile que j’annonce13 ». Car David est fils de Juda, et le Christ est fils de David. Or, en croyant au Christ nous appartenons à Juda: et nous avons connu le Christ, non pour l’avoir vu des yeux, mais nous le tenons par la foi. Qu’ils ne nous insultent donc plus, ces Juifs qui ne sont plus Juifs. Eux-mêmes l’ont dit : « Nous n’avons d’autre roi que César » ; il leur était plus avantageux d’avoir pour roi le Christ de la race de David, de la tribu de Juda. Mais comme le Christ issu de David selon la chair, est aussi Dieu béni par-dessus tout dans les siècles, il est tout ensemble notre roi et notre Dieu : notre roi parce que comme Christ, Seigneur et Sauveur, il est né selon la chair dans la tribu de Juda ; notre Dieu, parce qu’il est avant Juda, avant le ciel et la terre, puisque c’est par lui qu’a été fait le monde spirituel comme le monde visible. Or, si « tout a été fait par lui », Marie aussi, dont il est né, a été faite par lui. Dès lors, comment serait-il né comme le reste des hommes, Celui qui a fait la mère dont il devait naître ? Il est donc aussi notre Seigneur, selon ce mot de l’Apôtre à propos des Juifs : « Ils ont pour pères les patriarches, de qui est sorti selon la chair le Christ même, le Dieu au-dessus de tontes choses, et béni dans tous les siècles14 ». Mais les Juifs n’ayant vu le Christ que pour le crucifier, n’ont pas vu en lui un Dieu; les Gentils, au contraire, qui sans le voir ont cru en lui, l’ont reconnu pour Dieu. Si donc ceux-ci ont compris le Seigneur qui se réconciliait le monde dans le Christ15, tandis que ceux-là l’ont crucifié, parce qu’ils n’ont point compris en lui un Dieu qui se cachait dans la chair, arrière cette Judée qui en porte le nom et qui ne l’est plus: et que la véritable Judée s’approche, elle à qui l’on a dit : « Approchez-vous de Dieu, et vous serez éclairés, et la confusion ne sera point sur votre visage ». Le visage du véritable Juif n’aura point à rougir. Car ils ont entendu, et ils ont cru : et l’Eglise est devenue la véritable Judée, où est connu le Christ, qui est homme de la lignée de David, et Dieu au-dessus de David.


  1. Ps. LXXV, 2. ↩

  2. Rom. II, 29.  ↩

  3. Nomb. XVIII, 20. ↩

  4. Gen. XLVIII, 5, 6.  ↩

  5. I Rois, IX, 1.  ↩

  6. Id. XVI, 12.  ↩

  7. Gen. XLIX , 10.  ↩

  8. II Tim. II.  ↩

  9. Jean , VIII , 58. ↩

  10. Id 1 3,  ↩

  11. Luc, III, 1. ↩

  12. Jean, XIX, 15. ↩

  13. II Tim. II, 8. ↩

  14. Rom. IX, 5. ↩

  15. II Cor. V, 19. ↩

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