9.
« Vous lui avez ouvert la voie, vous en avez planté les racines, elle a rempli la terre1 ». Aurait-elle pu remplir la terre, si Dieu ne lui eût ouvert la voie? Quelle est cette voie ouverte en sa présence? « Je suis », dit le Seigneur, « la voie, la vérité, la vie2 ». C’est donc avec raison qu’elle a rempli la terre. Ce qui est prédit de cette vigne, est accompli pour jamais. Mais qu’est-ce qui précède? « Son ombre a couvert les montagnes, et ses branches les cèdres les plus élevés. Elle a étendu ses pampres jusqu’à la mer, et ses rameaux jusqu’au fleuve3». Il faut ici une explication, il ne suffit pas de lire et d’applaudir : aidez-moi de votre attention. Cette vigne, en effet, dont il est question dans notre psaume, embarrasse bien souvent les hommes peu attentifs. Nous avons déjà parlé de l’étendue de cette vigne, nous en avons dit l’origine et les causes de son accroissement. « Vous avez ouvert la voie en sa présence, vous en avez planté les racines, elle a rempli la terre ». Ceci est la prophétie de son extension. Toutefois cette vigne est le premier peuple Juif. Or, cette nation juive a régné depuis la mer jusqu’au fleuve. Depuis la mer, car nous voyons dans l’Ecriture qu’elle avoisine la mer4, et jusqu’au fleuve du Jourdain. Car au-delà du Jourdain, il y avait quelque partie de ce peuple, mais en-deçà de ce fleuve était toute la nation. Le royaume des Juifs, le royaume d’Israël s’étendait donc « jusqu’à la mer, et jusqu’au fleuve»; et non, «depuis la mer jusqu’à la mer, et depuis le fleuve jusqu’aux confins de la terre ». C’est le prolongement de cette vigne, dont le Prophète a dit : « Vous avez ouvert un chemin en sa présence, vous en avez planté les racines, elle a rempli la terre ». Alors après vous avoir prédit l’extension de cette vigne, le Prophète revient à ses commencements, d’où elle s’est si fort agrandie. Veux-tu entendre le commencement? « Depuis la mer jusqu’au fleuve ». Et la fin? « Elle domine depuis la mer jusqu’à la mer, et depuis le fleuve jusqu’aux confins de la terre5». C’est dire : « Elle a rempli la terre ». Voyons donc le témoignage d’Asaph, ce qui est arrivé à la première vigne, et ce qui doit arriver à la seconde vigne, ou plutôt à la même vigne. Car c’est bien la même, et pas une autre. C’est de là qu’est venu le Christ: le salut vient des Juifs6; de là les Apôtres, de là ces premiers fidèles qui apportaient aux pieds des Apôtres le prix de leurs biens i; c’est d’elle qu’est venu tout cela. Et si quelques rameaux « ont été brisés à cause de leur incrédulité : toi7 », peuple des Gentils, « tiens ferme dans la foi, ne cherche pas à t’élever, mais crains. Car si Dieu n’a point épargné les rameaux, il ne t’épargnera point. Si tu te glorifies, ce n’est point toi qui portes la racine, mais la racine te porte8 ». Cette vigne, en présence de laquelle Dieu ouvrit la voie, afin qu’elle remplît la terre, où fut-elle d’abord? « Son ombre a couvert les montagnes ». Quelles sont ces montagnes? Les Prophètes. Pourquoi son ombre les a-t-elle couvertes? Parce qu’ils étaient obscurs dans la prédiction de l’avenir. Tu entends dire aux Prophètes : Observe le sabbat; que l’enfant soit circoncis le huitième jour; offre en sacrifice le bélier, le veau et le bouc. Ne t’étonne point, ce sont là des ombres qui couvrent la montagne de Dieu; après l’ombre viendra la lumière. «Et ses branches, les cèdres de Dieu », c’est-à-dire couvrent les cèdres de Dieu les plus hauts, mais de Dieu. Car il y a des cèdres qui sont le symbole des orgueilleux que Dieu doit détruire. Donc cette vigne, dans ses accroissements, a couvert les cèdres du Liban, les grandeurs du monde, les montagnes de Dieu, tous les saints Prophètes, les patriarches.