22.
« Si je disais mon pied est ébranlé; votre miséricorde, ô mon Dieu, me soutenait1 ». Vois combien l’aveu est précieux devant Dieu. Ton pied chancelle, et tu ne dis point : Mon pied chancelle; mais tu affirmes que tu es ferme lorsque déjà tu es abattu. Au contraire, lorsque tu te sens ébranler, lorsque tu chancelles, confesse ton ébranlement pour n’avoir pas à pleurer ta chute; afin que Dieu te tende la main et que ton âme n’aille point dans les enfers. Dieu veut la confession, il aime l’humilité. Tu es ébranlé parce que tu es homme, il te soutient parce qu’il est Dieu. Dis-lui donc ce Mon pied est ébranlé ». Pourquoi dire : Je tiens ferme, lorsque ton pied s’ébranle? « Si je disais: Mon pied chancelle, votre miséricorde me soutenait, ô mon Dieu ». C’est ainsi que Pierre ne mit point sa confiance en lui-même. On vit un jour le Seigneur marchant sur la mer, foulant aux pieds toutes les têtes orgueilleuses de ce monde. Et il a montré qu’il foulait aux pieds les têtes orgueilleuses, quand il marcha sur les flots en courroux. Ainsi en est-il de l’Eglise, car c’est l’Eglise qui est Pierre. Et toutefois Pierre n’osa de lui-même marcher sur la mer : mais que dit-il? « Seigneur, si c’est vous, ordonnez que j’aille à vous sur les eaux ». Jésus marche par sa puissance, Pierre par l’ordre de Jésus. « Ordonnez que j’aille à vous », dit-il. Et Jésus répondit : « Viens2». L’Eglise donc marche sur la tête des superbes: mais comme elle est l’Eglise, comme elle a sa part des infirmités humaines, afin d’accomplir cette parole : « Si je disais : Mon pied est chancelant », Pierre chancela sur la mer, et s’écria: « Seigneur, je péris ». Ainsi donc, ce qui est écrit ici : « Si je disais : Mon pied a chancelé », se traduit dans l’Evangile par : « Seigneur, je péris3 ». Et cette autre parole : « Votre miséricorde me soutenait », s’accomplit ici : « Jésus tendit la main en disant : Homme de peu de foi, ce pourquoi douter4? » Dieu est admirable dans les épreuves qu’il envoie aux hommes; et nos propres dangers nous rendent plus cher le libérateur. Voyez en effet ce qui suit. Le Prophète a écrit : « Si je disais: Mon pied a chancelé : votre miséricorde venait à mon secours, ô mon Dieu ». Le Seigneur qui l’a tiré du danger lui est devenu plus cher; et en exposant cette bonté du Seigneur, il s’écrie : « Seigneur, vos paroles ont versé dans mon âme une joie proportionnée à mes douleurs5 ». Ces douleurs étaient grandes, et grandes aussi vos consolations; la blessure était cuisante, mais le remède en est doux.