3.
« Cherchez le Seigneur, et reprenez courage1, « confortamini ». Cette expression rend mieux la force du grec, bien qu’elle semble moins latine. Aussi trouvons-nous dans certains exemplaires : Confirmamini, soyez plus fermes; dans d’autres: Corroboramini, soyez plus forts. C’est -à Dieu que l’on dit en effet: « Vous êtes ma force2 » ; et encore : « C’est pour vous que je garderai ma force 3 » ; afin qu’en le cherchant, et qu’en nous approchant de lui, nous soyons éclairés et raffermis: de peur que l’aveuglement ne nous empêche de voir ce qu’il faut faire, et la faiblesse de faire ce que nous pourrions voir. Donc, afin que nous puissions voir, on nous dit : « Approchez, et soyez dans la lumière4» ; et afin que nous puissions agir: « Cherchez le Seigneur, et acquérez la force. Cherchez toujours sa face». Qu’est-ce que la face du Seigneur, sinon la présence de Dieu? Il en est de même de la face du vent, et de la face du feu; il est dit en effet : « Comme le vent chasse la paille devant sa face5 »; et encore: « Comme la cire coule en face du feu6», et bien d’autres passages de l’Ecrilure, où la face ne signifie rien autre chose que la présence. Mais que signifie : «Cherchez toujours sa face? » Je sais que le souverain bonheur pour moi est de m’attacher à Dieu7. Mais si je cherche Dieu toujours, quand le trouverai-je? Ou bien « toujours », signifierait-il pendant toute cette vie que nous passons ici-bas, depuis que nous avons connu que nous devions le faire, puisque après l’avoir trouvé, il faut le chercher encore ? La foi l’a trouvé en effet, mais l’espérance le cherche encore. La charité l’a trouvé par la foi, mais elle cherche à le posséder par la claire vue; c’est alors que nous le trouverons de manière qu’il nous suffira, et que nous ne devrons plus le chercher. Si la foi ne le trouvait en cette vie, l’Ecriture ne nous dirait point : « Cherchez le Seigneurs; et quand vous l’aurez trouvé, que l’impie abandonne ses voies, et l’homme d’iniquité ses pensées8 ». De même, si l’on ne devait point le chercher encore après l’avoir trouvé, elle ne dirait point: « Si nous espérons ce que nous ne voyons pas, nous l’attendons par la patience9» ; ni avec saint Jean: « Nous savons que quand il apparaîtra, nous serons semblables à lui, parce que nous le verrons tel qu’il est10 ». Et quand nous l’aurons vu face à face, et tel qu’il est, ne faudra-t-il point le chercher encore, et le chercher sans fin, puis. qu’il faut l’aimer sans fin? A un homme pré. sent, nous disons en effet : Je ne te recherche point, pour lui dire, je ne t’aime point. D’où il suit que l’on recherche celui que l’on aime, alors même qu’il est présent, et qu’un amour continuel s’efforce de ne s’en éloigner jamais. L’amour, loin de se fatiguer de la vue de son objet, le veut toujours sous ses yeux, le cherche même présent. Tel est le sens de cette parole: « Cherchez toujours sa face » ; en sorte que cette recherche qui signifie l’amour, ne finit point lorsque l’on trouve; mais à mesure que l’amour s’enflamme, on recherche encore celui qu’on avait trouvé.