1.
J’ai entrepris, mes frères, d’exposer a votre sainteté, chacun à son rang, les cantiques des degrés, cantiques de celui qui aime et qui s’élève, qui s’élève parce qu’il aime. Tout amour monte ou descend. L’amour du bien nous élève à Dieu, comme l’amour du mal nous entraîne à l’abîme. Mais comme un désir dépravé nous a déjà fait tomber il nous reste, si nous connaissons celui qui est, non point tombé, mais descendu vers nous, à nous attacher à lui pour nous relever, ce qui nous est impossible par nos propres forces. Notre-Seigneur Jésus-Christ l’a dit lui-même : « Nul n’est monté au ciel, sinon celui qui est descendu du ciel, le Fils de l’homme qui est au ciel1 ». Il semble ne parler ainsi que de lui seul. Les autres sont donc demeurés ici-bas, puisque celui-là seul est remonté, qui seul était descendu. Que doivent faire les autres? S’unir à son corps, afin de ne faire qu’un même Christ, qui est descendu, puis remonté. La tête est descendue, elle remonte avec le corps; le Christ s’est revêtu de son Eglise, qu’il a rendue sans tache et sans ride2. Seul donc il est remonté. Mais lorsque nous sommes unis àlui de manière à devenir ses membres, il n’est plus avec nous qu’un même Christ, un et toujours un. L’unité nous joint à celui qui est un. Il n’y a donc, pour ne point monter avec lui, que ceux qui n’ont point voulu s’unir à lui. Maintenant que ce chef est au ciel, qu’il est immortel après avoir ressuscité cette chair qui l’a un instant assujéti à la mort, et que dans le ciel il n’est plus en butte aux persécutions, ni aux violences, ni aux outrages, comme il a daigné s’y soumettre sur la terre, il a pris en pitié son corps militant sur la terre, et a dit « Saul, Saul, pourquoi me persécuter3? » Nul ne le touchait, et cependant il criait du ciel qu’il souffrait persécution. Ne nous décourageons donc point, raffermissons au contraire notre confiance, puisque, s’il nous est uni sur la terre par la charité, cette même charité nous unit à lui dans le ciel. Nous avons montré comment il est avec nous sur la terre; nous avons fait retentir ce cri du ciel : « Saul, Saul, pourquoi mie persécuter? » Comment pouvons-nous montrer que nous sommes avec lui dans le ciel ? Par le témoignage du même saint Paul, qui nous dit : « Si vous êtes ressuscités avec le Christ, cherchez ce qui est en haut, où le Christ est assis à la droite de Dieu ; ayez du goût pour les choses du ciel, et non pour celles de la terre, car vous êtes morts, et votre vie est cachée en Dieu avec le Christ4». Jésus-Christ donc est encore sur la terre, et déjà nous sommes dans le ciel. Il est ici-bas par une charité compatissante, nous sommes en haut par la charité qui espère. « Car c’est l’espérance qui nous sauve5 ». Mais, comme notre espérance est certaine, ce qui n’est encore qu’un avenir s’affirme à notre sujet comme s’il était accompli.