26.
Toutefois, mes frères, il est bon de vous le dire, on rencontre l’orgueil chez un pauvre, et l’humilité chez un riche: nous en voyons chaque jour. Quelquefois tu entends un pauvre qui gémit sous l’oppression d’un riche, et quand ce riche puissant l’opprime, le pauvre est humble; quelquefois il ne l’est pas même à ce moment, il est encore orgueilleux; ce qui nous montre comme il serait, s’il avait quelque bien. C’est donc par le coeur, et non par la bourse qu’on est pauvre selon Dieu. On rencontre parfois un homme dont la maison est bien remplie, qui a de vastes domaines, de riches maisons de campagne, beaucoup d’or et d’argent, et qui sait qu’il n’y doit point mettre sa confiance, qui s’humilie devant Dieu, et emploie ses richesses en bonnes oeuvres ; son coeur s’élève tellement en Dieu, qu’il comprend, non-seulement que ses richesses ne servent de rien, mais qu’elles entravent sa marche, si Dieu ne le conduit, et ne vient à son secours; et le voilà au nombre des pauvres qui sont rassasiés de pains. On en voit un autre qui mendie et qui est orgueilleux, ou s’il n’est orgueilleux, c’est qu’il n’a rien, mais qui voudrait avoir de quoi s’enorgueillir. Or, Dieu n’a aucun égard au bien que l’on possède, mais au bien que l’on voudrait posséder;et il juge selon ce désir, qui nous fait aspirer aux biens temporels, mais non sur ces biens que nous n’avons pu acquérir. De là cette parole de l’Apôtre à l’égard des riches: « Ordonnez aux riches de ce monde de n’être point orgueilleux, de ne point mettre leur confiance dans des richesses incertaines, mais dans le Dieu vivant, qui nous donne en abondance tout ce qui est nécessaire à la vie ». Que feront-ils donc de leurs richesses? Le même Apôtre continue en disant: « Qu’ils soient riches en bonnes oeuvres; qu’ils donnent facilement, et fassent part de leurs biens». Et vois que dans ce cas ils sont pauvres en cette vie : « Qu’ils se fassent un trésor et un fondement solide pour l’avenir, afin qu’ils embrassent la vie éternelle1 ». Quand ils la posséderont, c’est alors seulement qu’ils seront riches; mais, qu’ils se reconnaissent pauvres, jusqu’à ce qu’ils la possèdent. C’est ainsi que Dieu compte parmi ses pauvres qu’il rassasie de pains, ceux qui sont humbles de coeur, qui sont affermis dans la double charité, quels que soient d’ailleurs les biens qu’ils possèdent.
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I Tim. VI, 17-19. ↩