12.
Voilà le sort réservé aux méchants qui veulent me nuire. Pour moi, que deviendrai-je? Quel sera mon partage? « Mon âme se réjouira dans le Seigneur», comme dans celui qui lui aura dit: « Je suis moi-même ton salut ». Ne recherchant, à vrai dire, aucune richesse eu dehors de lui, ne désirant avoir en abondance ni les plaisirs ni les biens de la terre, aimant Dieu comme son véritable Epoux, sans espoir de récompense, sans demander à recevoir de lui ce qui pourrait la charmer, mais en se proposant comme l’unique objet de son bonheur. Car, pourrai-je entrer en possession d’un objet meilleur que Dieu? Je suis aimé de Dieu : il t’aime aussi ; voici ses propositions : demande ce que tu veux. Si l’empereur te disait : Demande ce que tu veux comme tu te hâterais de demander la dignité de tribun ou de comte ! Que de choses tu désirerais recevoir pour toi et pour les autres ! Dieu te dit: Demande ce que tu veux ; que lui demanderas-tu donc? Elargis le cercle de tes pensées; donne toute leur ampleur à tes désirs de posséder; écarte autant que possible les limites de ton ambition; dilate tes convoitises. Ce n’est pas le premier venu qui te dit: Demande ce que tu veux; c’est le Dieu tout-puissant. Si tu es amateur de domaines, tu voudras posséder toute la terre tu désireras que tous ceux qui viennent au monde soient tes fermiers ou tes serviteurs et quand tu aurais toute la terre, que posséderais-tu? Si tu demandes la mer, tu ne pourras vivre dans son sein : les poissons qu’elle renferme seront au-dessus des atteintes de ton avarice. Mais, peut-être, posséderas-tu les îles? Elève-toi au-dessus de ce monde ; et, quoique des ailes te manquent pour voler dans les airs, demandes-en l’immensité; porte ton ambition jusque dans le ciel; demande à devenir le maître du soleil, de la lune et des étoiles, car celui qui les a créés, t’a dit : Demande ce que tu veux. Et, cependant, tu ne trouveras rien de plus précieux ni de meilleur que celui qui a fait toutes choses. Demande à posséder le Créateur lui-même, et en lui, et par lui tu posséderas tout ce qu’il a fait. Tout est digne d’être aimé, parce que tout est beau; mais, qu’y a-t-il de-plus beau que lui? En tout, il y a de la puissance; mais qu’y a-t-il de plus puissant que lui ? Et il ne veut plus rien ardemment que se donner lui-même à toi. Si tu trouves mieux, demande-le; nais si tu demandes autre chose, tu lui fais injure, et tu te portes du dommage, parce que tu lui préfères ses créatures, quand il veut se donner lui-même à toi, et te donner, en sa personne, le Créateur de toutes choses.
Dans ces sentiments d’amour, une âme lui a dit: «Seigneur, est-ce que vous êtes mon partage1? » C’est-à-dire: Vous êtes mon partage. Que ceux qui désirent des richesses choisissent ce qu’ils veulent; qu’ils prennent leur part dans les biens de ce monde : pour moi, vous êtes mon partage; je vous ai choisi. Et encore : « Vous êtes la part de mon héritage ». Qu’il te possède, afin que tu le possèdes: tu seras son domaine ; tu seras sa maison. Il possède une âme pour lui faire du bien ; en le possédant on en tire avantage.
Est-ce que tu peux lui être de quelque utilité? « J’ai dit au Seigneur : Vous n’avez pas besoin de mes biens2. Mon âme se réjouira dans le Seigneur; elle trouvera toute sa consolation dans son Sauveur». Le salut qui vient de Dieu, c’est le Christ, « car mes yeux ont vu votre salut3 ».