37.
Quant à ce qui est écrit : « L'enfant qui reçoit la parole s'éloignera de la perdition ; il la reçoit pour lui et rien de faux ne sort de sa bouche1 », quelqu'un prétend que cette « parole que l'enfant reçoit » n'est autre que la parole de Dieu, c'est-à-dire la vérité. Par conséquent cette sentence : « L'enfant qui reçoit la vérité s'éloignera de la perdition », correspond à cette autre: « Vous perdez tous ceux qui profèrent le mensonge ». Et qu'insinue la suite du texte , « il la reçoit pour lui », sinon ce que dit l'Apôtre : « Que chacun éprouve ses propres oeuvres, alors il trouvera sa gloire dans lui-même et non dans un autre2? » En effet celui qui reçoit la parole, c'est-à-dire la vérité, non pour lui-même, mais pour plaire aux hommes, ne la garde plus dès qu'il voit qu'il peut plaire à ceux-ci par le mensonge. Mais celui qui la reçoit pour lui, ne laisse rien de faux sortir de sa bouche ; même quand le mensonge pourrait plaire aux hommes, il ne ment point, parce qu'il n'a pas reçu la vérité pour leur plaire mais pour plaire à Dieu. Ici il n'y a plus moyen de dire : « Il perdra tous ceux qui profèrent le mensonge », mais non toute espèce de mensonge, puisque tous les mensonges sont universellement exclus par ces mots. «Et rien de faux ne sort de sa bouche». Cependant un autre prétend qu'il en est ici comme pour le texte interprété par saint Paul: « Et moi je vous dis de ne jurer en aucune façon3 ». Là, en effet, tout serment est exclu, mais seulement de la bouche du coeur; il ne doit jamais se faire de bon gré, mais par égard pour l'infirmité d'un autre, c'est-à-dire provenir du mal d'un autre, à qui où ne peut faire, accepter sa parole qu’ en l'appuyant d'un serment, ou provenir de notre mal propre, en ce que revêtus de l'enveloppe de notre mortalité, nous ne pouvons mettre notre coeur à découvert, sans quoi- nous n'aurions pas besoin de serments. Du reste, si dans l'ensemble ces paroles : « L'enfant recevant la parole s'éloignera de la perdition », doivent s'entendre de la Vérité par qui tout a été fait, qui est immuable et éternelle ; comme la doctrine religieuse a pour but de conduire à sa contemplation, on pourrait croire que ces mots. « Et rien de faux ne sort de sa bouche », signifient que rien de faux ne doit se mêler à cette doctrine : genre de mensonge qu'aucune compensation ne saurait autoriser et qu'il faut éviter absolument et avant tout. Que si ces mots : « rien de faux », doivent, à moins d'absurdité, s'entendre de toute espèce de mensonge ; celui qui pense qu'on peut mentir en certain cas, entendra par «sa bouche» la bouche du coeur suivant l'explication donnée plus haut.