CHAPITRE XV.
LES ROMAINS SE SONT DONNÉ CERTAINS DIEUX, NON PAR RAISON, MAIS PAR VANITÉ.
Mais n’est-il pas évident que c’est la vanité plutôt que la raison qui les a guidés dans le choix de leurs fausses divinités? Ce grand Platon, dont ils font un demi-dieu, qui a consacré de si importants ouvrages à combattre les maux les plus funestes, ceux de l’âme qui corrompent les moeurs, Platon n’a pas été jugé digne d’une simple chapelle; mais pour leur Romulus, ils n’ont pas manqué de le mieux traiter que les dieux, bien que leur doctrine secrète le place au simple rang de demi-dieu. Ils sont allés jusqu’à lui donner un flamme, c’est-à-dire un de ces prêtres tellement considérés chez les Romains, comme le marquait le signe particulier de leur coiffure1, que trois divinités seulement en avaient le privilège, savoir : Jupiter, Mars et Romulus ou Quirinus, car ce fut le nom que donnèrent à Romulus ses concitoyens quand ils lui ouvrirent en quelque façon la porte du ciel. Ainsi, ce fondateur de Rome a été préféré à Neptune et à Pluton, frères de Jupiter, et même à Saturne, père de ces trois dieux; on lui a décerné le même honneur qu’à Jupiter; et si cet honneur a été étendu à Mars, c’est probablement parce qu’il était père de Romulus.
Ce signe était l’apex, baguette environnée de laine que les flamines portaient à l’extrémité de leur bonnet. Voyez Servius, ad Aeneid., lib. II, V. 683, et lib. VIII, V 654. — Valère Maxime raconte ( lib. I, cap. 1, § 4), que le flamine Sulpicius perdit sa dignité pour avoir laissé l’apex tomber de sa tête pendant le sacrifice. ↩
