Edition
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Contra Faustum Manichaeum libri triginta tres
3.
Augustinus respondit: O mirabilem insaniam de Christo aliquid narranti nolle credi Matthaeo et velle credi Manichaeo! Si Matthaeus non interfuit, cum Christus dixisset: Non veni solvere legem aut prophetas sed adimplere, et propterea non est ei credendum, numquid Manichaeus interfuit aut iam vel natus fuit, cum Christus inter homines appareret? p. 485,6 Secundum hanc ergo fidei vestrae legem nihil ei de Christo testificanti credere debuistis. Nos autem non propterea dicimus non credendum esse Manichaeo, quia dictis factisque Christi non interfuit et longe post natus est, sed quia de Christo contra Christi discipulos loquitur et contra evangelium, quod illorum auctoritate firmatum est. Habemus enim apostoli vocem, qui in spiritu sancto tales venturos esse cernebat. Unde fidelibus dicebat: Si quis vobis evangelizaverit praeterquam quod accepistis, anathema sit. Nam si nemo de Christo vera dicit, nisi qui eum praesens vidit et audivit, hodie de illo nemo vera dicit. Porro si hodie propterea de illo fidelibus eius vera dicuntur, quia illi, qui viderunt et audierunt, vel praedicando vel scribendo ea disseminaverunt, cur ex ore Iohannis condiscipuli sui non posset vera Matthaeus audire de Christo, ubi ille adfuit et ipse non adfuit, si ex libro Iohannis possumus vera loqui de Christo non solum nos tanto post nati, sed etiam post nos alii nascituri? p. 485,22 Hinc enim non solum Matthaei verum etiam Lucae ac Marci evangelium, qui eosdem discipulos secuti sunt, in non imparem auctoritatem receptum est. Huc accedit, quia et ipse dominus potuit narrare Matthaeo, quod antequam eum vocasset, cum iis egerat, quos prius vocaverat. At enim hoc ipse Iohannes in evangelio suo ponere debuit, si hoc dictum a domino audierat, qui cum diceretur, praesens erat. Quasi fieri non potuit, ut cum omnia, quae a domino audierat, scribere non posset, inter alia, quae praetermisit, et hoc praetermiserit, cum in alia scribenda esset intentus. p. 486,5 Nonne evangelium suum ita ipse conclusit dicens: Et alia quidem multa fecit Iesus; quae si scriberentur singula, nec ipsum existimo capere mundum qui scribuntur libros.? Hic utique ostendit se scientem multa praetermisisse. Sed si de lege et prophetis vos delectat Iohannis auctoritas, Iohanni credite attestanti legi et prophetis! Ipse scripsit, quod Esaias viderit Christi gloriam. In eius habetis evangelio, unde iam paulo ante tractavimus: Si crederetis Moysi, crederetis et mihi; de me enim ille scripsit. Undique tergiversatio vestra contunditur. Aperte dicite non vos credere Christi evangelio! Nam qui in evangelio quod vultis, creditis, quod vultis non creditis, vobis potius quam evangelio creditis. p. 486,18
Traduction
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Contre Fauste, le manichéen
CHAPITRE III. RÉPONSE D'AUGUSTIN. POURQUOI LE TÉMOIGNAGE DE SAINT MATTHIEU DOIT ÊTRE ACCEPTÉ.
Augustin. O étonnante folie ! défendre de croire à Matthieu racontant quelque chose du Christ, et ordonner de croire à Manès ! Si Matthieu n'était pas là quand le Christ disait: « Je ne suis pas venu abolir la loi et les Prophètes, mais les accomplir[^4] », et que pour cela il faille rejeter son témoignage ; Manès y était-il, ou même était-il déjà né, quand le Christ a paru parmi les hommes? Donc, d'après votre règle de foi, vous ne deviez point accepter son témoignage touchant le Christ. Pour nous, ce n'est pas parce que Manès n'a pas été témoin des paroles et des actions du Christ, ni parce qu'il est né longtemps après, que nous disons qu'on ne doit pas croire à sa parole; mais parce qu'il parle du Christ contre les disciples du Christ et contre l'évangile établi sur leur autorité. Nous avons là-dessus la parole de l'Apôtre qui prévoyait, dans l'Esprit-Saint, qu'un jour naîtraient de tels contradicteurs. Il disait donc aux fidèles : « Si quelqu'un vous prêche un autre évangile que celui que vous avez reçu, qu'il soit anathème ![^5] » Si en effet personne ne peut dire du Christ des choses vraies, à moins de l'avoir vu et entendu, personne n'en dit rien de vrai aujourd'hui. Or, si aujourd'hui encore, on peut dire aux fidèles des vérités sur le Christ, parce qu'elles proviennent de témoins oculaires et auriculaires, qui les ont répandues parla prédication ou par l'écriture pourquoi Matthieu n'aurait-il pas pu apprendre des vérités sur le Christ, de la bouche de Je au, son frère dans l'apostolat, qui a été témoin quand il ne l'était pas lui-même, alors que nous pouvons, nous qui sommes nés si longtemps après, alors que nos descendants pourront dire des vérités du Christ d'après le livre même de Jean? C'est ainsi que non-seulement l'évangile de Matthieu, mais aussi ceux de Luc et de Marc, qui ont suivi les mêmes Apôtres, ont été reçus et jouissent d'une égale autorité. Outre que le Seigneur lui-même a bien pu raconter à Matthieu ce qu'il avait fait, avant de l'appeler, avec ceux dont la vocation avait précédé la sienne, — Mais, dira-t-on, Jean n'aurait-il pas dû mentionner cela dans son évangile, lui qui était présent et qui avait entendu, si toutefois le Seigneur l'a dit? — Comme si, dans l'impossibilité d'écrire tout ce qu'il avait entendu de la bouche du Seigneur, il n'avait pas pu omettre ce point entre tant d'autres qu'il a omis, son attention étant fixée sur d'autres sujets ! N'est-ce pas lui qui termine ainsi son évangile : « Il y a encore beaucoup d'autres choses que Jésus a faites; si elles étaient écrites en détail, je ne pense pas que le monde entier pût contenir les livres qu'il faudrait écrire[^1] ». Evidemment il fait voir par là qu'il a omis sciemment bien des choses. Mais si c'est le témoignage de Jean que vous recherchez sur la loi et les Prophètes, croyez donc à Jean rendant témoignage à la loi et aux Prophètes. C'est lui qui a écrit qu'Isaïe a vu la gloire du Christ[^2]. C'est dans son évangile que vous trouverez le passage que j'ai exposé un peu plus haut : « Si vous croyiez Moïse, vous me croiriez sans doute aussi : car c'est de moi qu'il a écrit[^3] ». Vous avez beau tergiverser : tout vous confond. Dites sans détour que vous ne croyez pas à l'Evangile du Christ : car en admettant dans l'Evangile ce qui vous plait, en en rejetant ce qui ne vous convient pas, ce n'est plus à l'Evangile, mais à vous, que vous croyez.
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Matt. V, 17.
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Gal. I, 9.
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Jean, XXI, 25.
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Id. XII, 41.
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Id. V, 46.