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Contre Fauste, le manichéen
CHAPITRE XV. EN QUOI LE CHRIST RESSEMBLE A MOÏSE, ET EN QUOI IL EN DIFFÈRE.
Je ne conteste point que ces paroles de Dieu à Moïse, que tu as choisies comme si faciles à réfuter : « Je leur susciterai, du milieu de leurs frères, un prophète semblable à toi[^7] », que, ces paroles, dis-je, soient une prédiction relative au Christ. Et les magnifiques et gracieuses épithètes dont tu as cherché à colorer et à barioler ton langage ordurier, n'ont nullement ébranlé ma croyance sur ce point. Comparant en effet le Christ et Moïse, et désirant faire ressortir leurs différences, pour empêcher de rapporter au Christ ce passage écrit : « Je leur susciterai un prophète semblable à toi », tu as établi plus d'un contraste : l'un est homme, l'autre est Dieu; l'un pécheur, l'autre saint; l'un est né d'un couple, l'autre d'une vierge selon vous, et, selon nous, pas même d'une vierge; l'un meurt sur la montagne pour avoir offensé Dieu, l'autre, pour le bon plaisir de son père, souffre une mort volontaire. Comme si, quand on fait une comparaison, la ressemblance devait être parfaite de toute manière et en tout point ! Non seulement on dit que les choses sont semblables entre elles, quand elles sont d'une seule et même nature, comme deux jumeaux, ou des enfants vis-à-vis de leurs parents, ou des hommes quelconques vis-à-vis d'autres hommes, en tant qu'ils sont hommes, comme aussi il est facile de le voir chez les animaux ou parmi les arbres, quand on compare un olivier à un olivier, ou un laurier à un laurier; mais on dit encore que des choses sont semblables, quoiqu'elles soient de nature différente, comme l'olivier greffé et l'olivier sauvage, la farine grossière et la farine de froment. Et encore je parle ici de choses analogues et qui se touchent de près. Mais qu'y a-t-il de plus éloigné du Fils de Dieu, par qui tout a été fait[^1], qu'une brebis ou une pierre? Et cependant, on lit dans l'Evangile : « Voici l'Agneau de Dieu[^2] », et l'Apôtre nous dit : « Or, la pierre était le Christ[^3] » : ce que personne ne pourrait dire convenablement, si le Fils de Dieu n'admettait aucune comparaison. Qu'y a-t-il donc d'étonnant que le Christ n'ait pas dédaigné d'être comparé à Moïse, lui qui est devenu semblable à l'Agneau que Dieu, par l'organe de Moïse, avait ordonné à son peuple de manger, dont le sang était une sauvegarde et qui s'appelait la pâque[^4]? autant de traits figuratifs dont il n'est pas permis de ne pas voir l'accomplissement dans le Christ. Ainsi donc, d'après l'Ecriture, je reconnais la différence, mais, d'après l'Ecriture, reconnais aussi la ressemblance. Or, la différence ne part pas du même point que la ressemblance; l'une a une cause et l'autre une autre; il nous reste seulement à les démontrer toutes les deux. Le Christ est différent de l'homme, parce qu'il est Dieu; car il est écrit de lui : « Qui est au-dessus de toutes choses, Dieu béni dans tous les siècles[^5] » ; et le Christ est semblable à l'homme, parce qu'il est homme; puisqu'il est également écrit de lui : « Un médiateur entre Dieu et les hommes, le Christ Jésus homme[^6] ». Le Christ est différent du pécheur, parce qu'il est toujours saint; et le Christ est semblable au pécheur, parce que Dieu a envoyé son Fils dans une chair semblable à celle du péché, afin de condamner le péché dans la chair par le péché même[^8]. Le Christ est différent de l'homme né d'un couple, en tant qu'il est né d'une vierge, mais il lui est semblable en tant qu'il est né d'une femme à qui il a été dit : « Le Saint qui naîtra de vous sera appelé le Fils de Dieu[^9] ». Le Christ est différent de l'homme mort à cause de son péché, en tant qu'il est sans péché et qu'il a subi une mort volontaire; mais en revanche il est semblable à un homme mort, en tant qu'il a subi véritablement la mort corporelle.
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Deut. XVIII, 15, 18.
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Jean, I, 3.
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Id. 29.
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I Cor. X, 4.
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Ex. XII.
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Rom. IX, 5.
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I Tim. II, 5.
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Rom. VIII, 3.
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Luc, I, 35.
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Reply to Faustus the Manichaean
15.
I still hold that there is a reference to Christ in the passage which you select for refutation, where God says to Moses, "I will raise up unto them from among their brethren a prophet like unto thee." 1 The string of showy antitheses with which you try to ornament your dull discourse does not at all affect my belief of this truth. You attempt to prove, by a comparison of Christ and Moses, that they are unlike, and that therefore the words, "I will raise up a prophet like unto thee," cannot be understood of Christ. You specify a number of particulars in which you find a diversity: that the one is man, and the other God; that one is a sinner, the other sinless; that one is born of ordinary generation, the other, as we hold, of a virgin, and, as you hold, not even of a virgin; the one incurs God's anger, and is put to death on a mountain, the other suffers voluntarily, having throughout the approval of His Father. But surely things may be said to be like, although they are not like in every respect. Besides the resemblance between things of the same nature, as between two men, or between parents and children, or between men in general, or any species of animals, or in trees, between one olive and another, or one laurel and another, there is often a resemblance in things of a different nature, as between a wild and a tame olive, or between wheat and barley. These things are to some extent allied. But there is the greatest possible distance between the Son of God, by whom all things were made, and a beast or a stone. And yet in the Gospel we read, "Behold the Lamb of God," 2 and in the apostle, "That rock was Christ." 3 This could not be said except on the supposition of some resemblance. What wonder, then, if Christ condescended to become like Moses, when He was made like the lamb which God by Moses commanded His people to eat as a type of Christ, enjoining that its blood should be used as a means of protection, and that it should be called the Passover, which every one must admit to be fulfilled in Christ? The Scripture, I acknowledge, shows points of difference; and the Scripture also, as I call on you to acknowledge, shows points of resemblance. There are points of both kinds, and one can be proved as well as the other. Christ is unlike man, for He is God; and it is written of Him that He is "over all, God blessed for ever." 4 Christ is also like man, for He is man; and it is likewise written of Him, that He is the "Mediator between God and man, the man Christ Jesus." 5 Christ is unlike a sinner, for He is ever holy; and He is like a sinner, for "God sent His Son in the likeness of sinful flesh, that by sin He might condemn sin in the flesh." 6 Christ is unlike a man born in ordinary generation, for He was born of a virgin; and yet He is like, for He too was born of a woman, to whom it was said, "That holy thing which shall be born of thee shall be called the Son of God." 7 Christ is unlike a man, who dies on account of his own sin, for He died without sin, and of His own free-will; and again, He is like, for He too died a real death of the body.