CHAPITRE XLIV. PROPHÉTIE DE DANIEL ACCOMPLIE. APPLICATION AUX JUIFS ET AUX MANICHÉENS.
Qui ne reconnaîtra ce même Sauveur dans Daniel, quand le fils de l'homme est offert à l'Ancien des jours et reçoit de lui un règne sans fin, pour que toutes les nations lui obéissent[^8]? Bien plus, si vous faites attention au lieu même dont le Seigneur a parlé d'après la prophétie de Daniel : « Quand vous verrez l'abomination de la désolation, prédite par le prophète Daniel, régnant dans le lieu Saint, que celui qui lit, comprenne[^1] » ; si vous supputez les semaines d'années et tenez compte de leur nombre, non-seulement vous trouverez là le Christ, mais même le temps où il a dû venir pour souffrir. Du reste, sans calcul de temps, par la seule évidence des faits accomplis, nous confondons les Juifs avec qui il s'agit d'examiner, non pas si le Christ est notre Sauveur, mais s'il est déjà venu. Or, ils sont convaincus parles faits les plus manifestes, non-seulement par la conversion si éclatante, si incontestable, de toutes les nations qui devaient un jour lui être soumises, d'après les prédictions de l'Ecriture elle-même, (autorité irrécusable pour eux) ; mais encore par tout ce qui s'est accompli au sein de leur propre nation, par exemple, la destruction du Sanctuaire; la cessation des sacrifices, du sacerdoce, de l'onction primitive : toutes choses que Daniel avait prédites pour l'époque même où il annonçait clairement que le Saint des saints recevrait l'onction[^2]. Or, tomme tout cela s'est réalisé, on leur demande où est le Saint des saints, et ils ne savent que répondre. D'ailleurs comment discuteraient-ils avec nous, non pas sur la personne du Christ, mais sur le temps de son arrivée, s'ils ne savaient parfaitement qu'il a été annoncé dans leurs livres? Pourquoi demandent-ils à Jean s'il est le Christ[^3]? Pourquoi disent-ils au Seigneur lui-même : « Jusqu'à quand tiendrez-vous notre esprit en suspens ? Si vous êtes le Christ, dites-le-nous ouvertement[^4] ». Pourquoi Pierre, André et Philippe disent-ils à Nathanaël : « Nous avons trouvé le Messie ce qu'on interprète par le Christ[^5] », sinon parce que ce nom était connu de ce peuple par les saintes Ecritures et était l'objet de son attente ? Car aucune autre nation n'a des rois et des prêtres appelés christs, et dont l'onction symbolique ne dût cesser qu'à l'arrivée de Celui dont ils étaient la figure[^6]. Les Juifs ne voyaient dans leurs christs que ce Christ unique en qui ils espéraient un libérateur ; mais, aveuglés par un secret dessein de la justice divine, en ne songeant qu'à sa puissance, ils n'ont pas compris l'infirmité dans laquelle il est mort pour mus..Aussi savons-nous que c'est d'eux que ces paroles du livre de la Sagesse ont été dites d'avance : « Condamnons-le à la mort la plus infâme : car il sera traité selon ses paroles ; s'il est vraiment Fils de Dieu, Dieu prendra sa défense, et le délivrera des mains de ses ennemis. Ils ont pensé ainsi et ils se sont trompés : car leur malice les a aveuglés[^7] ». Et c'est avec la plus grande vérité qu'on peut aussi appliquer ce passage à ceux qui, au milieu de tant de témoignages, malgré un tel ensemble de prophéties, malgré tant de faits si visiblement accomplis, nous disent encore que le Christ n'a point été annoncé par les Ecritures. Et s'ils ne cessent de le .répéter, nous pouvons aussi leur donner sans fin des preuves, avec l'aide de Celui qui nous a procuré une telle abondance de témoignages contre les calomnies et les erreurs des hommes, que nous n'avons pas même besoin de revenir sur ce que nous avons déjà dit.
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Dan. VII, 13,14.
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Dan. IX, 27 ; Matt. XXIV, 15.
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Dan. IX, 24, 27.
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Jean, I, 19.
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Id. X, 24.
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Id. I, 41.
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I Rois, X, 1, 2 ; Ex. XXIX.
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Sag. II, 18, 21.