CHAPITRE XVIII. DIVERSES ESPÈCES DE SACRIFICES. SACRIFICE DU CHRIST. SACRIFICE DES MANICHÉENS.
Néanmoins, je voudrais bien que vous me dissiez pourquoi vous donnez les noms de temple, d'autel, de sacrifice à ces choses que vous louez en vous. Car si ces véritables hommages ne sont pas dus au vrai Dieu, pourquoi les recommande-t-on, pourquoi en fait-on l'éloge dans la vraie religion ? Mais si on doit au Dieu véritable un véritable sacrifice (ce qu'on appelle à juste titre : honneurs divins) les autres ne sont appelés sacrifices que par analogie à celui-là. Or, les uns sont des imitations suggérées par des dieux faux et menteurs, c'est-à-dire par les démons, qui exigent par orgueil les honneurs divins de la part de leurs dupes; tels sont ou tels étaient tous ceux qu'on offrait aux idoles dans les temples païens. Les autres étaient des figures du seul et très-réel sacrifice, qui devait être offert dans la suite pour les péchés de tous les croyants; tels étaient ceux prescrits par Dieu aux anciens pères, où se trouvait même l'onction mystique, emblème prophétique de celle du Christ qui lui a même emprunté son nom. Or, ce vrai sacrifice, dû au seul vrai Dieu, et que le Christ seul a accompli sur son autel, les démons s'en attribuent arrogamment la figure dans l'immolation des victimes. Ce qui fait dire à l'Apôtre : « Ce qu'immolent les Gentils, ils l'immolent aux démons et non à Dieu[^1] » : blâmant par là non ce qui était offert, mais le but pour lequel on l'offrait. Quant aux Hébreux, dans les sacrifices d'animaux qu'ils offraient à Dieu sous des formes nombreuses et variées, comme le sujet le méritait, ils honoraient prophétiquement le futur sacrifice que le Christ a consommé. Ensuite les chrétiens célèbrent à leur tour la mémoire du sacrifice accompli, par la très-sainte oblation et la réception du corps et du sang du Christ. Mais les Manichéens ignorant ce qu'il faut condamner dans les sacrifices des Gentils, ce qu'il faut entendre dans les sacrifices des Hébreux, et ce qu'il faut croire et observer dans le sacrifice des chrétiens, offrent leur folie en sacrifice au démon qui les a trompés, s'éloignant de la foi pour se livrer à des esprits séducteurs et aux doctrines des démons hypocrites et menteurs.
- I Cor. X, 20.