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De la trinité
CHAPITRE V.
LA TRINITÉ DE L’HOMME EXTÉRIEUR N’EST PAS L’IMAGE DE DIEU. LA RESSEMBLANCE DE DIEU SE VOIT JUSQUE DANS LE PÉCHÉ.
- Mais de même que quand la forme et l’apparence du corps ont disparu, la volonté ne peut reporter sur lui le sens de la vue; ainsi quand l’image conservée par la mémoire a été effacée par l’oubli, la volonté ne saurait fixer sur elle le regard de l’âme par le souvenir. Toutefois, comme l’âme a le pouvoir de se figurer non-seulement les choses oubliées, mais celles dont elle n’a jamais eu la sensation ni l’expérience, et d’augmenter, de diminuer, de changer et de modifier, à son gré celles qu’elle n’a point oubliées : souvent elle s’imagine comme réel un objet qu’elle sait ne pas être tel qu’elle le fait, ou qu’elle ne connaît pas comme tel. Ici il faut prendre garde qu’elle ne mente pour tromper, ou ne se fasse illusion à elle-même. A part ces deux inconvénients, les fantômes de l’imagination ne sauraient lui nuire; comme les choses dont elle a expérimenté la sensation et qu’elle a retenues dans la mémoire, ne lui portent aucun préjudice, si elle ne les recherche pas trop avidement quand elles lui plaisent ni ne les évite honteusement quand elles lui déplaisent. Mais quand la volonté s’y vautre avec délices, au détriment de biens meilleurs, elle devient. impure; et il est dangereux d’y penser quand elles sont présentes, et plus dangereux encore quand elles sont absentes.
C’est donc pécher et se dégrader que de vivre selon la trinité de l’homme extérieur, parce que cette trinité, quoiqu’elle imagine à l’intérieur, imagine pourtant des choses extérieures et qu’elle a pour but l’usage des choses sensibles et matérielles. En effet, personne ne pourrait user de celles-ci même convenablement, si les images des objets sensibles n’étaient conservées par la mémoire; et à moins que la partie principale de la volonté ne se maintienne dans l’intérieur et dans une région plus élevée, à moins encore que la partie qui se prête soit aux corps à l’extérieur, soit à leurs images à l’intérieur, ne rapporte à une vie meilleure et plus vraie tout ce qu’elle leur emprunte, et ne cherche son repos dans la fin même en vue de laquelle elle juge à propos de faire ces actions : que serait-ce faire, sinon ce que l’Apôtre défend de faire, quand il dit: « Ne vous conformez point à ce siècle (Rom., XII, 2. )? » Ainsi donc cette trinité n’est point l’image de Dieu : car c’est de ce qu’il y a de plus imparfait dans la création, c’est-à-dire de la créature matérielle, bien inférieure à l’âme, qu’elle se forme dans l’âme elle-même par les sens du corps. Cependant elle a quelques traits de ressemblance. Et quelle créature n’a pas, dans son genre et dans sa proportion, quelque ressemblance avec Dieu, puisque Dieu a tout fait très-bon (Eccli., XXXIX, 21 ), précisément parce qu’il est souverainement bon? Donc tout ce qui existe, en tant qu’il est bon, a une ressemblance, quoique très-imparfaite, avec le souverain bien : ressemblance juste, et bien ordonnée, si elle est conforme à la nature, mais honteuse et coupable, si elle est vicieuse. Car même dans leurs péchés, les âmes offrent encore quelque ressemblance avec Dieu, alors qu’elles usent d’une liberté orgueilleuse, déplacée, et, pour ainsi dire, servile. On n’aurait pas même pu entraîner nos premiers parents au péché, si on ne leur avait dit : « Vous serez comme des dieux (Gen., III, 5 ) ». Cependant on ne doit pas appeler image de Dieu toute créature qui a quelque ressemblance avec Dieu, mais seulement celle qui n’est inférieure qu’à lui. Celle-là seule porte véritablement son empreinte, parce qu’il n’y a pas de nature intermédiaire entre elle et lui.
- La forme du corps est donc comme le père de cette vision, c’est-à-dire de la forme qui se reproduit dans le sens de celui qui voit, puisque c’est d’elle que celle-ci provient. Mais ce n’est point là un véritable père; et la vision n’est point un véritable fils, car elle n’en est pas uniquement engendrée, puisque, pour la former, un autre objet doit être appliqué au corps, à savoir le sens du spectateur. Voilà pourquoi se complaire là, c’est s’aliéner soi-même (Voir., I Retract., ch. XV ). Aussi la volonté qui unit cette espèce de père et cette espèce de fils est pulls spirituelle qu’eux. En effet, le corps qui est vu, n’est en aucune façon spirituel. La vision qui se forme dans le sens a quelque chose de spirituel, puisqu’elle ne peut exister sans l’âme:
elle ne l’est cependant pas entièrement, puisque le sens informé est corporel. Par conséquent, la volonté qui unit l’un à l’autre est plus spirituelle, comme je l’ai dit, et semble représenter dans cette trinité la personne du Saint-Esprit. Mais elle appartient plus au sens informé qu’à l’objet matériel qui l’informe. Car le sens de l’être animé est aussi la volonté de l’âme, et non celle de la pierre ou d’un corps visible quelconque. Elle ne procède donc point de celui-ci, comme d’un père, ni de la vision ou forme qui est dans le sens, comme d’un fils. En effet, la volonté qui a appliqué à l’objet visible le sens à informer, existait déjà avant la vision; mais elle n’y avait pas encore mis sa complaisance. Car comment se complaire en ce qu’on n’a pas encore vu? Or la complaisance, c’est la volonté en repos. Nous ne pouvons donc pas appeler la volonté fils de la vision, puisqu’elle existait avant elle; ni son père, puisque ce n’est pas de la volonté, mais de l’objet visible, que la vision est formée et produite.
Edition
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De Trinitate
V.
[V] Sed quia praevalet animus non solum oblita verum etiam non sensa nec experta confingere ea quae non exciderunt augendo, minuendo, commutando, et pro arbitrio componendo, saepe imaginatur quasi ita sit aliquid quod aut scit non ita esse aut nescit ita esse. In quo genere cavendum est ne aut mentiatur ut decipiat aut opinetur ut decipiatur. Quibus duobus malis evitatis nihil ei obsunt imaginata phantasmata sicut nihil obsunt experta sensibilia et retenta memoriter si neque cupide appetantur si iuvant neque turpiter fugiantur si offendunt. Cum autem in his voluntas relictis melioribus avida volutatur, immunda fit, atque ita et cum adsunt perniciose et cum absunt perniciosius cogitantur. Male itaque vivitur et deformiter secundum trinitatem hominis exterioris quia et illam trinitatem quae licet interius imaginetur, exteriora tamen imaginatur, sensibilium corporaliumque utendorum causa peperit. Nullus enim eis uti posset etiam bene nisi sensarum rerum imagines memoria tenerentur, et nisi pars maxima voluntatis in superioribus atque interioribus habitet, eaque ipsa quae commodatur sive foris corporibus sive intus imaginibus eorum nisi quidquid in eis capit ad meliorem verioremque vitam referat atque in eo fine cuius intuitu haec agenda iudicat adquiescat. Quid aliud facimus nisi quod nos apostolus facere prohibet dicens: Nolite conformari huic saeculo?
Quapropter non est ista trinitas imago dei. Ex ultima quippe, id est corporea creatura qua superior est anima, in ipsa anima fit per sensum corporis. Nec tamen est omni modo dissimilis. Quid enim non pro suo genere ac pro suo modulo habet similitudinem dei quandoquidem deus fecit omnia bona valde non ob aliud nisi quia ipse summe bonus est? In quantum ergo bonum est quidquid est in tantum scilicet quamvis longe distantem habet tamen nonnullam similitudinem summi boni, et si naturalem utique rectam et ordinatam; si autem vitiosam utique turpem atque perversam. Nam et animae in ipsis peccatis suis non nisi quandam similitudinem dei superba et praepostera et, ut ita dicam, servili libertate sectantur. Ita nec primis parentibus nostris persuaderi peccatum posset nisi diceretur: Eritis sicut dii. Non sane omne quod in creaturis aliquo modo simile est deo etiam eius imago dicenda est, sed illa sola qua superior ipse solus est. Ea quippe de illo prorsus exprimitur inter quam et ipsum nulla interiecta natura est.
[9] Visionis igitur illius, id est formae quae fit in sensu cernentis, quasi parens est forma corporis ex qua fit. Sed parens illa non vera, unde nec ista vera proles est; neque enim omnino inde gignitur quoniam aliquid aliud adhibetur corpori ut ex illo formetur, id est sensus videntis. Quocirca id amare alienari est. Itaque voluntas quae utrumque coniungit quasi parentem et quasi prolem magis spiritalis est quam utrumlibet illorum. Nam corpus illud quod cernitur omnino spiritale non est; visio vero quae fit in sensu habet admixtum aliquid spiritale quia sine anima fieri non potest, sed non totum ita est quoniam ille qui formatur corporis sensus est. Voluntas ergo quae utrumque coniungit magis, ut dixi, spiritalis agnoscitur, et ideo tamquam personam spiritus insinuare incipit in illa trinitate. Sed magis pertinet ad sensum formatum quam ad illud corpus unde formatur. Sensus enim animantis et voluntas animae est non lapidis aut alicuius corporis quod videtur. Non ergo ab illo quasi parente procedit, sed nec ab ista quasi prole, hoc est visione ac forma quae in sensu est. Prius enim quam visio fieret iam erat voluntas quae formandum sensum cernendo corpori admovit, sed nondum erat placitum. Quomodo enim placeret quod nondum erat visum? Placitum autem quieta voluntas est. Ideoque nec quasi prolem visionis possumus dicere voluntatem quia erat ante visionem, nec quasi parentem quia non ex voluntate sed ex viso corpore formata et expressa est. [10] Finem fortasse voluntatis et requiem possumus recte dicere visionem ad hoc dumtaxat unum; neque enim propterea nihil aliud volet quia videt aliquid quod volebat.