XVII.
Soutenir que l'on doit détruire le baptême de Jésus-Christ parce que c'est ce baptême même que confèrent les hérétiques, c'est se mettre dans la nécessité logique de conclure que l'on doit également nier Jésus-Christ, puisque les démons eux-mêmes proclament sa divinité. Pierre reçut les plus grands éloges pour avoir répondu : « Vous êtes le Christ, Fils du Dieu vivant1 » ; les démons chassés du corps d'un possédé affirmèrent également : « Nous savons que vous « êtes le Fils de Dieu2 ». Cette confession de Pierre lui mérita une récompense, tandis que celle des démons leur fut nuisible; cependant toutes deux étaient parfaitement vraies en elles-mêmes et comme telles méritaient d'être applaudies. Or, les catholiques confèrent la vérité du baptême comme Pierre fit sa confession, tandis que cette même vérité du baptême est pour les hérétiques pervers, ce que cette même confession a été pour les démons. Elle sert aux premiers, elle condamne les seconds, et cependant pour les uns et pour les autres elle est la. vérité et à ce titre elle mérite d'être reconnue et applaudie. L'apôtre saint Jacques, voulant réfuter ceux qui prétendaient que la foi seule, sans les œuvres de la charité, suffit au salut, emprunte sa comparaison aux démons eux-mêmes, pour prouver à ses adversaires qu'il ne suffit pas de croire au Dieu véritable, si à la foi on n'ajoute point les bonnes oeuvres. « Vous croyez, » dit-il, «en un « Dieu unique; vous faites bien; les démons y croient aussi et ils frémissent3 ». Ainsi, d'après cet Apôtre, croire au Dieu véritable, et passer sa vie dans des œuvres mauvaises, c'est ressembler aux démons; cependant il se garde bien d'ajouter que l'on doit, en haine des démons, nier ce qu'il y a de vrai dans leur croyance à l'égard de Dieu. Quand donc nous entendons notre antagoniste citer ces paroles de l'Apôtre : « Un Dieu, une foi, un baptême4 », il nous est prouvé de nouveau qu'en dehors de l'Église il est des hommes qui adorent Dieu sans le connaître; nous savons d'ailleurs, qu'en dehors de l'Église, la foi en un seul Dieu est professée non-seulement par certains hommes, mais même parles démons. Ces deux points, d'ailleurs, nous sont attestés, plutôt que niés par les Apôtres. Si donc nous trouvons l'unité du baptême dans ceux qui sont en dehors de l'Église, pourquoi ne pas confirmer cette unité, au lieu de la nier; pourquoi, sous prétexte de corriger ce qu'il y a en eux de dépravé, dépraverions-nous le peu de bien qui leur reste ? Servons-nous, au contraire, de ce qu'ils ont de vrai pour corriger ce qu'ils ont de mauvais.