XXXV.
Pourquoi dès lors, de la part de nos adversaires, cette fureur qui les pousse à se séparer du corps de Jésus-Christ, dont l'unité, selon la prophétie, se réalise d'une manière miraculeuse et embrasse toutes les contrées et toutes les nations de la terre ? Ne peut-on pas appliquer à notre auteur ces paroles «L'enfant mauvais proclame sa propre justice, mais il ne justifie pas sa sortie1 » ; c'est-à-dire qu'il ne peut alléguer aucun motif qui justifie son hérésie et sa sortie de la maison de Dieu? S'il était véritablement juste, il se souviendrait que l'apôtre saint Paul vivait avec ces faux frères, dont il gémit dans ses épîtres ; que Cyprien vivait avec ceux qu'il regardait comme non baptisés et portant dans leur conscience le poids de leurs péchés passés, quand il savait cependant qu'Etienne les accueillait dans le sein de l'Eglise. Comme ces saints, il persévérerait dans l'Eglise de Jésus-Christ avec ceux qu'il regardait comme coupables de toute sorte d'injustice; il ne se croirait aucunement souillé par leur présence dans l'Eglise, il ne trouverait pas dans les méchants un motif d'abandonner les bons, bien plutôt il tolérerait les méchants à cause des bons, comme on tolère la paille avec le grain, et il n'aspirerait à aucune autre séparation qu'à celle qui doit se faire sous le poids de la charité, et il ne se rendrait pas semblable à cette poussière légère qui se laisse emporter par le moindre souffle avant même la ventilation. De cette manière, il persévérerait dans l'unité catholique, même avec les pécheurs que les filets de l'unité doivent contenir jusqu'au rivage de la vie éternelle, et en cela il n'aurait à craindre ni de courir avec le voleur, ni de participer aux péchés des autres, ni de se souiller au contact d'aucune iniquité, ni de se corrompre par le levain de qui que ce fût. Rien de tout cela n'arrive qu'autant que l'on consent au péché, ce qui eut lieu dans le paradis terrestre de la part du premier homme qui, par l'intermédiaire de la femme, se laissa séduire par le serpent. Quant à la participation aux mêmes sacrements, elle ne peut produire cet effet; Judas impur communia avec les autres apôtres, sans porter aucune atteinte à leur innocence. Tout en participant, avec les méchants, aux mêmes sacrements divins, les bons, quoique encore dans l'aire et non dans les greniers du père de famille, se séparent en réalité des méchants, mais par la différence des moeurs et non par la séparation des corps; ils vivent différemment, mais ils se réunissent dans les mêmes temples; c'est ainsi que tout en se distinguant des méchants, ils ne se séparent pas de l'unité de l'Eglise.
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Prov. XXIV, selon les LXX. ↩