60.
Je consens à établir entre nous une discussion au sujet de ces écrits de Cicéron, parce qu'on y trouve encore quelques vestiges de vérités, et cependant, quant aux passages que vous avez cités, vous avouerez, je pense, qu'ils ne prouvent absolument rien contre nous. Je vais en citer, à mon tour, qui prouveront évidemment contre vous. Dans son troisième livre de la République, Cicéron dit de l'homme, que «la nature s'est montrée pour lui, non pas une mère, mais une marâtre, car elle le jette sur la terre avec un corps nu, fragile et infirme, et avec un esprit anxieux dans les chagrins, humble dans la crainte, mou pour le travail et enclin à des passions de toute sorte : et cependant, au sein de ces maux, dont il est accablé, on trouve encore je ne sais quelle flamme divine qui constitue l'intelligence et le génie». Qu'opposez-vous à ce langage? L'auteur ne voit pas, dans ces imperfections et ces maux de notre nature, le résultat de l'inconduite, mais l'oeuvre même de la nature. Il a pu constater les phénomènes, mais il en ignorait la cause. En effet, il ne savait pas pourquoi un joug bien lourd pèse sur les enfants d'Adam, « depuis leur sortie du sein de leur mère, jusqu'au jour de leur sépulture dans les entrailles de la terre1 ». Entièrement étranger à nos Livres saints, il n'avait aucune notion du péché originel. Toutefois, s'il avait applaudi à cette concupiscence que vous louez, il n'aurait pas gémi de trouver dans votre esprit une inclination si prononcée vers les passions.
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Eccli. XL, 1. ↩