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Ebloui par tous les raisonnements que vous formulez vainement contre moi, vous ne voyez pas que vous aiguisez les armes dont les Manichéens se servent contre la vérité. Vous soutenez que l'enfant n'est souillé d'aucun péché originel, «parce que le péché », dites-vous, «ne peut sortir d'une oeuvre qui n'est pas un péché ». Comment donc de l'oeuvre divine, qui n'était pas un péché, a pu naître le péché de l'ange et le péché de l'homme? Vous voyez quel appui vous prêtez à ces hérétiques, malgré toutes les protestations que vous nous prodiguez de votre attachement inébranlable à la foi catholique. «Le péché ne peut naître d'une oeuvre qui n'est pas un péché » ; selon les termes de cette définition, il doit être certain que les œuvres de Dieu sont sans péché; quelle est donc l'origine du péché? Grâce à vous, le Manichéen se trouve plus autorisé que jamais à soutenir l'existence d'une autre nature essentiellement mauvaise, et qui soit le principe du péché; car « la faute ne peut naître d'une oeuvre de Dieu » ; ce sont là vos propres expressions. Peut-on, dès lors, réfuter les Manichéens sans vous réfuter vous-même? L'ange et l'homme sont l'oeuvre de Dieu, et l'oeuvre essentiellement innocente dans sa source ; et cependant le péché est sorti de l'ange et de l'homme, lorsque, par leur libre arbitre, ils se sont séparés de Celui qui est la sainteté même, et qui leur avait donné le libre arbitre dans une parfaite innocence. Tous deux, l'ange et l'homme, sont devenus mauvais, non pas en ce sens que le mal soit venu se mêler à eux, mais parce qu'ils se sont volontairement séparés du bien.