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Œuvres Augustin d'Hippone (354-430) Contra Iulianum l. vi Contre Julien
LIVRE SIXIÈME. LE QUATRIÈME LIVRE DE JULIEN

60.

J'ai dit : « comment des péchés parfaitement écoulés, quant à l'acte lui-même, restent toutefois dans leur culpabilité ; et de là j'ai conclu, mais dans un autre sens, que la concupiscence peut demeurer en acte, quoique le péché dont elle est la suite ait été pleinement effacé1 ». En vertu de vos principes erronés, vous regardez comme fausse cette dernière conclusion, mais la vérité vous convainc de mensonge. En effet, sentant fort bien que vous n'avez rien à répondre, vous recourez à toutes les ténèbres de la dialectique pour mieux tromper les faibles, et vous vous écriez que «vous ne pouvez imaginer dans quelle dialectique j'ai trouvé la réciproque de toutes les contraires ». Pour réfuter une telle proposition, et pour mettre ces sortes de matières à la portée de l'intelligence de tous ceux qui n'y sont point initiés, il me faudrait sans doute un fort volume. Mais, pour le moment, je n'ai besoin d'autre chose que de vos propres paroles : « Dans aucune dialectique, on ne peut trouver la réciproque de toutes les contraires ». Si je comprends vos paroles, elles signifient que l'on peut trouver la réciproque de certaines propositions contraires, et non pas de toutes. Eh bien ! c'est dans ces quelques contraires que j'ai trouvé la réciproque. Si vous aviez dit d'une manière absolue qu'il n'y a de réciproque dans aucune contraire, et si vous aviez prouvé que les quelques réciproques que j'ai posées, ne sont pas admissibles, parce qu'il n'y en a aucune de possible, j'aurais dû vous démontrer à mon tour, que certains contraires admettent des réciproques, et, en particulier, ceux que j'ai énumérés. Mais c'est chose faite, puisque vous nous concédez le principe en affirmant, non pas que la réciproque n'est possible pour aucune contraire, mais seulement qu'elle n'est pas possible pour toutes. Donc elle est possible pour quelques-unes. Reste à savoir si elle est possible dans les quelques contraires que j'ai énumérées; c’est-à-dire, si les péchés peuvent rester quant à la coulpe, et passer quant à l'acte; et si, au contraire, la concupiscence peut demeurer quant à l'acte et passer quant à la coulpe; pour nous ces deux propositions sont hors de doute. Pour vous, il en est autrement, et pour mettre la raison de votre côté, vous avez dit ce que je n'ai pas dit moi-même. Parlant de la concupiscence , j'ai dit qu'elle reste dans nos membres, et qu'elle répugne à la loi de l'esprit2, quoique sa coulpe ait été effacée dans la rémission de tous les péchés ; au contraire, parlant d'un sacrifice offert aux idoles, j'ai dit que ce sacrifice, pourvu qu'il ne se renouvelle pas, est passé dans son acte, mais demeure quant à la coulpe, à moins qu'elle ne soit effacée par la miséricorde divine. En effet, le sacrifice offert aux idoles est un de ces actes qui cessent aussitôt qu'ils sont accomplis, et qui après leur accomplissement demeurent dans leur culpabilité, jusqu'à ce qu'elle soit effacée par le pardon. Au contraire, quant.à la concupiscence de la chair, elle est un état dans l'homme, un objet de lutte continuelle pour la continence, quoique la coulpe qu'elle avait contractée dans la génération, ait été effacée dans la régénération. Elle reste en acte, non pas sans doute en ce sens qu'elle domine absolument l'esprit, qu'elle lui impose le consentement et enfante par elle-même le péché, mais en ce sens qu'elle soulève dans l'homme cette foule de mauvais désirs auxquels l'esprit est obligé de résister. Ce mouvement est proprement l'acte même de la concupiscence, quoique cet acte reste sans effet par le refus de consentement de la part de l'esprit. Je suppose même que parfois cet acte cesse, ce mouvement se taise; toujours est-il que, même alors, l'homme porte le mal en lui-même, et c'est de ce mal que sortira peut-être tout à l'heure le mouvement dont je parle, et que nous nommons le désir. D'ailleurs, n'est-ce pas toujours contre un désir que nous combattons? Mais, s'il n'y a pas désir, parce que rien ne vient soulever la convoitise dans l'imagination ou dans les sens, il peut fort bien se faire qu'il y ait en nous une qualité mauvaise, pour le moment endormie faute de tentation ; tel homme timide peut ne rien craindre en ce moment, quoique la timidité soit réellement en lui. Mais, lorsqu'apparaît un objet propre à soulever la convoitise, si les désirs mauvais se dressent malgré nos résistances, concluons que nous ne possédons pas encore la santé parfaite. Quant à ce vice, ce n'est que par sa coulpe qu'il peut s'emparer de l'homme, quoique d'ailleurs il ait été produit par le bon usage que des époux chastes ont fait du mal de la concupiscence. Or, malgré la permanence du mal, cette coulpe est effacée dans la rémission de tous les péchés, par cette grâce de Dieu qui nous délivre de tous les maux, puisque Dieu, non-seulement nous pardonne tous nos péchés, mais guérit même toutes nos langueurs. Rappelez-vous la réponse que fit notre Libérateur et notre Sauveur à ceux qui lui ordonnaient de sortir de Jérusalem : « Voici que je chasse les démons, que je guéris aujourd'hui et demain les malades, et le troisième jour je suis mis à mort3 » . Lisez l'Evangile, et voyez combien de jours après il a souffert et est ressuscité. A-t-il donc été menteur ?

Dieu nous garde de le penser ! Mais il s'est exprimé en figure sur la question même débattue entre nous. En effet, l'expulsion des démons est l'image de la rémission des péchés ; la guérison des maladies figure le progrès des âmes après le baptême ; enfin, sa mort au troisième jour, telle qu'il l'a réalisée dans la mortalité de sa chair, est l'annonce des joies incorruptibles du ciel.


  1. Du Mariage et de !a Conc., liv. I, n. 29, 30. ↩

  2. Rom. VII, 23. ↩

  3. Luc, XIII, 32. ↩

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Contre Julien

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