11.
Saint Ambroise, comblé de vos éloges et placé par vous au premier rang des docteurs, pouvait-il se prononcer d'une manière plus claire et plus formelle sur la nature et le principe du péché originel? Pouvait-il mieux nous rendre raison de cette confusion primitive, causée par la révolte de la chair contre l'âme, révolte dont nous trouvons la guérison dans la grâce de Dieu par Jésus-Christ Notre-Seigneur? Vous voyez maintenant d'où vient que la chair convoite contre l'esprit; vous voyez d'où vient cette loi des membres répugnant à la loi de l'esprit. Vous voyez que cette discorde de l'âme et de la chair s'est changée entre notre nature, et que de ces longues inimitiés nous viennent toutes ces misères auxquelles la miséricorde de Dieu pourra seule mettre un terme. Cessez de vous constituer mon adversaire; autrement voyez contre quels hommes vous luttez dans ma personne. Vous avez dit de moi que j'aspire avant tout à ne pas être compris. Et dans certains passages de vos livres, vous dénaturez mes pensées pour vous les approprier, abusant ainsi de l'incapacité de certains hommes qui ne comprennent pas que vous n'aviez pas plus la volonté de vous taire, que le pouvoir de réfuter dans quatre grands livres un seul de mes petits ouvrages. Je viens d'ouvrir un libre cours à ce fleuve de l'éloquence d'Ambroise ; le lecteur peut-il ne pas être entraîné, et le lecteur inondé de lumières? Pourquoi l'Apôtre s'est-il écrié : « Qui donc me délivrera de ce corps de mort?» Parce que, répond saint Ambroise, nous naissons tous sous le péché, et que notre première origine a été viciée. Il prouve clairement que Jésus-Christ n'a jamais connu le péché, parce que, naissant d'une vierge, il est resté complètement étranger aux liens de notre génération coupable et de notre commune nature; voilà pourquoi il a condamné le péché qu'il n'avait point éprouvé en naissant. Il enseigne clairement que la dissension entre l'âme et la chair est retombée sur notre nature par la prévarication du premier homme. Il affirme expressément que notre corps, autrefois le rendez-vous des passions et des vices, devient le temple de Dieu et le sanctuaire des vertus, lorsque la chair, rentrant dans sa nature, ne sait plus voir dans la raison que le principe nourricier de sa force, et lorsque, déposant les prétentions de son audace, elle se soumet à l'arbitrage et à la direction modératrice de l'âme. C'est dans cet état qu'elle se trouvait lorsqu'elle fut appelée à habiter le paradis terrestre, avant que le venin contagieux du funeste serpent lui eût inoculé un principe de mort. Pourquoi donc vous obstiner dans vos attaques contre moi? Adressez-vous à saint Ambroise; accusez celui qui, avant même que votre hérésie n'eût pris naissance et n'eût distillé son venin, s'était levé pour l'éteindre et pour lui préparer un remède. Pourtant si ces passages ne vous suffisent pas, écoutez encore.
