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Jul. Nous avons ensuite parlé de la loi, jusqu'au temps de laquelle saint Paul a déclaré que le péché avait subsisté sans être connu. Tu as essayé de prolonger ce temps jusqu'à la fin de la loi, et tu n'as pas compris que ton argumentation n'avait absolument aucune valeur; car nous devions te mettre dans la nécessité, ou bien de prouver que ce péché, dont tu prétends faussement que saint Paul a parlé, et que tu affirmes avoir régné jusqu'au moment où l'Ancien Testament a été aboli, était imputé ou du moins pouvait être imputé sous la loi, ou bien de nous accorder que ce péché ne règne plus depuis Jésus-Christ, afin que les expressions de l'Apôtre, après avoir subi cette interprétation violente, fussent du moins conformes à ta doctrine. Mais tu n'as pu ni donner ces preuves, ni faire cette concession. La pureté de notre foi repose donc sur un fondement inébranlable, parce qu'elle est conforme aux principes de la raison, à la sainteté de la justice et aux enseignements constants de l'Apôtre.
Aug. La réponse donnée par nous précédemment et tes propres paroles prouvent également que tu ne dis rien de sérieux. Quand l'Apôtre a dit: « Le péché a subsisté dans le monde jusqu'à la loi », il a voulu parler, non-seulement du péché originel, mais de tous les péchés en général ; et ces péchés ont subsisté jusqu'à la loi, en ce sens que la loi n'a pu les faire disparaître, En disant : « Jusqu'à la loi », saint Paul a voulu que le temps de la loi elle-même fût compris dans cette expression ; de môme qu'il est dit dans l'Evangile : « Il y a donc en tout, depuis Abraham jusqu'à David, quatorze générations[^1] » ; car, pour que ce nombre soit complet, il faut entendre : Jusqu'à David inclusivement, et non pas: Jusqu'à David exclusivement. Ainsi , quand nous interprétons ces paroles : « Quatorze générations jusqu'à David », nous n'excluons pas celui-ci de ce nombre, mais nous le comptons comme terminant la série; de même aussi, quand nous lisons ces paroles : « Le péché a subsisté dans le monde jusqu'à la loi », nous devons les interpréter de telle sorte que le temps de la loi y soit compris au lieu d'en être exclu. Quoiqu'il soit dit dans l'Evangile : Quatorze jusqu'à David, ce dernier n'est pas pour cela en dehors de ce nombre; quoique saint Paul dise: «Le péché a subsisté jusqu'à la loi», celle-ci n'est pas pour cela exclue du temps pendant lequel a subsisté le péché. Conséquemment, personne n'ôte le péché, que la loi elle-même n'a pu faire disparaître , bien qu'elle soit sainte, et juste, et bonne, sinon celui de qui il a été dit: « Voici l'Agneau de Dieu, voici celui qui ôte les péchés du monde[^2] ». Il les ôte d'abord en pardonnant ceux qui sont commis, et parmi ceux-là il faut compter le péché originel; ensuite en nous aidant par sa grâce à les éviter et en nous conduisant à une vie où il nous sera impossible d'en commettre aucun.
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Matt. I, 17.
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Jean, I, 29.