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Jul. Certes, celui-là agirait d'une manière monstrueuse et inouïe, qui, laissant de côté les expressions propres, s'efforcerait, à l’aide d'un langage métaphorique et obscur, de forger une doctrine nouvelle, quoique supportable en elle-même; mais Augustin agit d'une manière infiniment plus révoltante, quand il prétend établir une doctrine obscène et où la justice de Dieu est calomniée, sur des maximes tellement équivoques que, de son propre aveu, ces maximes interprétées dans leur sens naturel sont des arguments contre lui; et pour qu'elles deviennent favorables à sa thèse, il est obligé d'attribuer aux mots un sens qu'ils n'ont pas. Quel homme instruit accepterait avec confiance un argument qui, devant le tribunal de la raison, serait considéré par son ennemi comme un esclave de naissance, et par son défenseur comme un fugitif dont on aurait injustement trafiqué ?
Aug. En dissertant ainsi sur le sens métaphorique et sur le sens propre des mots, tu prétends, sans tenir compte du petit nombre d'hommes qui comprennent ton langage et qui le trouvent extravagant; tu prétends faire croire à la multitude de ceux pour qui tes paroles sont une énigme, que tu dis quelque chose, quoique en réalité tu ne dises absolument rien. J'aime donc mieux laisser au petit nombre d'hommes instruits qui reconnaissent très-facilement, et sans que j'aie besoin de la leur faire voir, l'inanité de tes paroles; j'aime mieux, dis-je, laisser à ces hommes le soin de faire justice de tes arguties, plutôt que de les réfuter moi-même par une argumentation appuyée sur la vérité, mais qui échapperait à l'intelligence de la multitude. Cependant, ces paroles : « Le péché est entré dans le monde par un seul homme », en d'autres termes, par l'auteur de la génération qui était lui-même la figure de celui qui devait venir, c'est-à-dire, de l'auteur de la régénération ; ces paroles ne sont point employées dans un sens métaphorique, mais dans leur sens propre.