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Œuvres Augustin d'Hippone (354-430) Contra secundam Iuliani responsionem imperfectum Contre la seconde réponse de Julien
LIVRE CINQUIÈME. LE CINQUIÈME LIVRE DE JULIEN.

54.

Julien. Cette subtilité de divisions ayant échappé au Manichéen, le voilà qui nous a produit des Traduciens par milliers. Voici en effet son argumentation : D'où vient le mal? de la volonté assurément. D'où vient la volonté mauvaise ? de l'homme, répond-il. D'où vient l'homme? de Dieu. Et il conclut : Si le mal vient de l'homme, et l'homme par Dieu ; le mal vient par Dieu. Puis, par un retour de piété, pour ne pas attribuer le crime à Dieu, il va chercher la nature des ténèbres, pour lui attribuer le mal. Augustin dit à son tour: D'où vient le mal? de la volonté. D'où vient cette volonté? de l'homme qui est l'ouvrage de Dieu. Et il résume : Si le mal vient de la volonté, et la volonté de l'homme, et que l'homme soit l'ouvrage de Dieu , le mal vient donc de Dieu. Mais pour éviter cette conclusion et ne pas faire de Dieu un criminel (ce qu'affirme son comparse), le voilà qui met à la place de Dieu le néant qui nous fait violence, c'est-à-dire des ténèbres auxquelles nous devons attribuer le mal. « Si le mal est né dans l'homme », nous dit-il, « ce n'est point parce qu'il est l'ouvrage de Dieu, mais parce qu'il est fait de rien[^2] ». Comme si la vérité ne pouvait lui répondre : D'où vient chez ion Dieu cette impudente contradiction, de donner une volonté à l'homme puis de le condamner quand il sait que ce mal, ou le péché, vient nécessairement des ténèbres ou de l'antique néant? Nous voulons bien aborder par degrés le néant, afin de mettre au jour cette vertu du Traducien qui place dans le néant tout son espoir. Vois néanmoins la faiblesse de ce Dieu que le Traducien met en scène. Il n'a pu surmonter le néant : après avoir tiré du néant l'homme, il n'a pu l'exempter de la corruption du mal qui venait du néant; irrité par la difficulté , il s'en prend à l'homme de ses propres fautes, et il condamne son image à mourir pour les crimes du néant. Le vieux Manès le traite avec plus de bonté, en disant qu'il n'est pas dévasté complètement par la gent ténébreuse; or, le Traducien en conclut que telle est sa faiblesse, qu'il a été vaincu par le néant.

Augustin. Le rien ne saurait vaincre personne; mais toi, tu es vaincu en disant des riens : pour moi, ce n'est pas dans le néant que j'ai mis mes espérances, seulement dans ta loquacité tu aboutis au néant. Si tu comprends bien les absurdités de ton langage, Dieu est vaincu par le néant, parce qu'aucune réalité ne saurait vaincre Dieu. Qu'est-ce, en effet, que le néant, sinon rien? De même encore, Dieu ne saurait être supérieur au néant, parce que lui qui est supérieur à tout ne saurait être supérieur à ce qui n'est rien. Mais, nous dis-tu, Manès n'a point pénétré les subtilités de tes divisions, et c'est pourquoi il nous dit: « Si le mal vient de l'homme, et que l'homme soit par Dieu, le mal vient donc par Dieu »; afin que cette conclusion nous effraie et nous amène à nier ou que l'homme vient de Dieu, ou que le mal vient de l'homme, ou même à marquer l'un et l'autre de fausseté, comme il le fait lui-même, et par ce moyen il introduit je ne sais quelle substance ténébreuse qui a fait l'homme, et qui est principalement ce mal d'où tout mal est issu. Toi donc, si habile dans tes distinctions, quelle sagesse crois-tu qu'il nous faudra pour résister à ces ruses? Je dirai, nous réponds-tu, que le mal chez l'homme est possible, mais non nécessaire. Comme si Manès ne pouvait pas te répondre : Si le mal est possible, la possibilité vient de la nature, la nature par Dieu ; donc le. mal vient par Dieu. Si tu ne redoutes pas cette conclusion, moi je ne redoute pas l'autre : puisque tous deux nous confessons que le péché dans le premier homme était possible, et non nécessaire. Dire, en effet, que l'homme a pu pécher parce que sa nature n'est point tirée de celle de Dieu, quoiqu'il n'eût pu exister si Dieu ne l'eût créé, ce n'est pas dire, comme tu nous en accuses faussement, que la nécessité de pécher lui ait été imposée. Il pouvait assurément pécher et ne pas pécher; mais s'il n'eût pas été fait de rien, c'est-à-dire si sa nature eût été celle de Dieu, il eût été tout à fait impeccable. Quel homme, en effet, serait assez fou pour oser dire que cette nature immuable et sans changement, qui est Dieu, pourrait pécher d'aucune sorte, quand l'Apôtre nous dit : « Il ne peut être contraire à lui-même[^1]? » Nous résistons donc l'un et l'autre au Manichéen en disant qu'un Dieu bon et juste n'a pas fait l'homme tel qu'il fût dans la nécessité de pécher; qu'il a péché parce qu'il l'a voulu, et qu'il pouvait ne point le vouloir. Quant à ces maux si grands et si évidents que nous voyons dans sa postérité, qui ne sont point volontaires chez l'homme, mais avec lesquels il est né, dès lors que vous niez qu'ils lui viennent de son origine viciée par le péché, voilà que, pour introduire la nature du mal dont le mélange a corrompu la nature de Dieu, votre hérésie place le Manichéen comme dans une citadelle d'où la vérité vient vous débusquer l'un et l'autre.

  1. Lib. II de Nupt. et Concup., 28.

  2. II Tim. II, 13.

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Contre la seconde réponse de Julien

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