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Jul. Ainsi, quand le Seigneur prononça ces paroles : « Si le Fils vous délivre, vous serez alors véritablement libres[^2] », il promit le pardon aux coupables qui ont perdu, en commettant le péché, non pas la liberté de détermination, mais la justice de leur conscience. Le libre arbitre est aussi intègre après le péché qu'il l'était avant le péché : c'est en effet au moyen du libre arbitre qu'une foule d'hommes renoncent aux passions honteuses qui fuient la lumière[^3], et que, purifiés des souillures ignominieuses du vice, ils se revêtent des splendides ornements de la vertu.
Aug. Relis seulement le passage où tu dis toi-même[^4] que l'Apôtre a voulu parler de l'habitude du péché, quand il a écrit : « Je ne fais pas ce que je veux; et je fais au contraire ce que je hais ». Comment donc la volonté de l'Apôtre est-elle encore libre après le péché, puisque, sinon par la transmission de la faute originelle, que vous n'admettez pas, du moins, et sans que vous puissiez élever ici aucune objection, par l'habitude de commettre le péché, habitude dont vous consentez de mauvaise grâce et vaincus par une évidence irrésistible à reconnaître l'existence, il a tellement perdu la liberté que ses gémissements blessent vos oreilles et confondent votre audace, quand vous l'entendez s'écrier
« Je ne fais pas ce que je veux » ; et encore : « Je ne fais pas le bien que je veux ; mais je fais le mal que je ne veux pas[^4] ? »
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II Cor. IV, 2.
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Ci-dessus, chap. LXIX.
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Rom. VII, 15, 19.