3. Des psaumes et des prières qu'on récite aux heures de tierce, de sexte et de none.
Dans les monastères de la Palestine, de la Mésopotamie et de tout l'Orient, on ne dit tous les jours que trois psaumes, aux heures que nous venons de désigner. Ces prières qu'on offre à Dieu, à des moments déterminés, maintiennent l'âme en sa présence, sans que leur longueur empêche cependant de se livrer aux travaux nécessaires.
Nous voyons que le prophète Daniel offrait régulièrement à Dieu ses prières à ces trois heures de la journée, et qu'il ouvrait, pour le faire, les fenêtres de sa chambre. (Daniel, VI, 10.) Ce n'est pas sans rai-son que ces heures ont été choisies pour célébrer l'office; car c'est à ces heures qu'ont été accomplies les promesses divines et les grandes oeuvres de notre salut.
C'est à l'heure de tierce que l'Esprit-Saint, promis par les prophètes, est descendu sur les Apôtres qui étaient réunis pour prier. Les Juifs incrédules s'étonnaient de leur entendre parler toutes les langues, et expliquaient ce don du Saint-Esprit en disant, par dérision, qu'ils étaient pris de vin. Pierre, se tenant au milieu d'eux , leur dit : « O Juifs, et vous tous qui habitez Jérusalem, écoutez ce que je vais dire, et soyez attentifs à mes paroles. Ceux que vous entendez ne sont pas ivres, comme vous le pensez, puisque nous ne sommes qu'à la troisième heure. Mais c'est ce qui a été annoncé par le prophète Joël : Dans ces nouveaux jours, dit le Seigneur, je répandrai mon esprit sur toute chair; vos fils et vos filles prophétiseront, vos jeunes gens auront des visions, et vos vieillards des songes. En ces jours-là, je répandrai mon Esprit sur vos serviteurs et vos servantes, et ils prophétiseront. » (Act., II, 14; Joël, II, 28.) Toutes ces choses s'accomplirent à l'heure de tierce, et le Saint-Esprit, promis par les prophètes, descendit à ce moment sur les Apôtres.
Ce fut à la sixième heure que l'Hostie sans tache,
Notre-Seigneur et Sauveur Jésus-Christ, s'offrit à son Père pour le salut du monde, et monta sur la Croix où il effaça les péchés des hommes ; il désarma les principautés et les puissances ennemies, et il en triompha publiquement ; il nous délivra de cette dette insolvable que nous avions malheureusement contractée; il déchira le titre que nous avions souscrit, et l'attacha comme un trophée à sa croix. (Coloss., II, 14.)
A la même heure, saint Pierre, dans un ravissement, eut la révélation de la vocation des gentils figurée par le vase évangélique qui descendait du ciel, et il comprit la purification des animaux qui y étaient enfermés, lorsqu'une voix d'en haut lui dit. « Lève-toi, Pierre, tue et mange. » ( Ad., X, 13.) Cette nappe descendant du ciel par les quatre coins lui représentait évidemment l'Évangile. Les quatre récits des Évangélistes, qui semblent séparés, ne font cependant qu'un seul Évangile, qui expose sans se contredire la naissance du Christ, sa divinité, ses miracles et sa Passion. Il n'est pas dit que c'était une toile, mais comme une toile; la toile est le symbole de la mortification1. Notre-Seigneur, dans sa Passion, n'a pas subi la mort comme une loi de la nature humaine; mais il s'y est soumis lui-même volontairement. Il est dit que c'était comme de la toile, parce qu'il est mort selon la chair et non selon l'esprit. Son âme n'est pas restée aux enfers, et sa chair n'a pas vu la corruption. (Ps. XV, 10.) Et il a dit : « Personne ne m'ôte la vie, mais je la donne de moi-même. J'ai le pouvoir de la laisser, et j'ai aussi le pouvoir de la reprendre. (S. Jean, XI, 16.)
C'est dans cette enveloppe des Évangélistes descendue du ciel, c'est-à-dire inspirée par le Saint-Esprit, que toutes les nations qui vivaient en dehors des observances légales et qui passaient pour impures, ont été frappées par la foi et par la parole du Christ pour les faire mourir au culte des idoles, et elles sont devenues, par le ministère de Pierre, un aliment pur et salutaire.
A l'heure de none, Jésus-Christ descendit aux enfers et en dissipa les épaisses ténèbres par la splendeur de sa gloire. Il en brisa les portes d'airain et les serrures de fer; il délivra les saints qui s'y trouvaient captifs et les conduisit avec lui dans le ciel; il écarta l'épée de flamme et rendit à l'homme le paradis qu'il avait perdu.
Ce fut à la même heure que le centenier Corneille, qui persévérait dans l'oraison, apprit d'un ange que ses prières et ses aumônes étaient montées devant Dieu, et il eut ainsi, à l'heure de none, la révélation de la vocation des gentils, que saint Pierre avait eue dans son ravissement à l'heure de sexte. (Act., X.)
On lit aussi dans un autre passage des Actes des Apôtres que Pierre et Jean montaient au temple pour prier à la neuvième heure. (Act., III, 1.) Tout ceci prouve clairement que ce n'est pas sans raison que les saints des termes apostoliques ont consacré ces heures à la célébration des offices et que nous devons le faire à leur exemple. Si nous n'étions pas forcés , par une sorte de loi, de nous acquitter de ces exercices de piété à des heures régulières, nous pourrions quelquefois , par oubli, paresse ou embarras des affaires, passer tout le jour sans prier.
Que dirai-je des vêpres, de ces sacrifices du soir, que la loi de Moïse prescrivait dans l'Ancien Testament? Tous les jours, dans le temple, des holocaustes étaient offerts le malin, et des sacrifices le soir, et ces offrandes étaient des figures, comme le prouve David lorsqu'il dit : « Que ma prière s'élève en votre présence comme l'encens, et que mes mains élevées vers vous soient mon sacrifice du soir. (Ps. CXL., 2.)
On peut cependant donner à ce sacrifice du soir une interprétation plus profonde et y voir ce vrai sacrifice que Notre-Seigneur offrit dans la dernière cène avec ses Apôtres, lorsqu'il institua les plus augustes mystères de l'Église ; ou encore le sacrifice du soir qu'il offrit le jour suivant et qui durera jusqu'à la fin des siècles, lorsqu'il éleva les mains vers son Père pour le salut du monde entier. Il éleva les mains en les étendant sur la Croix. Il nous retira des abîmes où nous étions plongés, et nous éleva vers le ciel, selon la promesse qu'il nous avait faite : « Lorsque je serai élevé de terre , j'attirerai tout à moi. » (S. Jean, XIV, 21.)
Pour ce qui est de l'office du matin ou des laudes, nous savons à quoi nous en tenir, puisque nous y chantons tous les jours : « Mon Dieu, mon Dieu, je vous cherche dès l'aurore... Je vous méditerai dès le matin. » (Ps. LXII, 2, 5.) « Je me suis hâté de crier vers vous... Je vous ai regardé avant le jour, pour méditer vos paroles. » (Ps. CXVIII, 147, 148.)
C'est à ces différentes heures que le père de famille de l'Évangile conduisit les ouvriers dans sa vigne. (S. Matth. , XX.) Il est dit qu'il alla les chercher au point du jour, c'est le moment où nous disons les matines, puis à la troisième heure, à la sixième, à la neuvième, enfin à la onzième, qui représente l'office du soir, où nous avons besoin de lumière.
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La toile sert à ensevelir les morts. ↩