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Aussi l'exalte-t-il encore d'une autre manière, et en fait-il ressortir la grandeur, non pour en recevoir lui-même de l'éclat (on sait combien ce sentiment lui est étranger), mais pour manifester sa joie et écarter jusqu'à l'ombre du soupçon. C'est pour cela, comme je l'ai déjà dit, qu'il l'appelle sa gloire. Que dit-il donc encore ? « Car si j'évangélise, la gloire n'en est pas à moi, ce m'est une nécessité, et malheur à moi si je n'évangélise pas ! Si je le fais de bon coeur, j'en aurai la récompense, mais si je ne le fais qu'à regret, je dispense seulement ce qui m'a été confié. Quelle est donc ma récompense? C'est que, prêchant « l’Evangile, je prêche gratuitement l'Evangile du Christ, pour ne pas abuser de mon « pouvoir dans l’Evangile ». Que dites-vous, Paul ? Ce n'est pas pour vous une gloire d'évangéliser , ruais seulement d'évangéliser gratuitement? Est-ce donc quelque chose de plus grand ? Non, mais c'est davantage sous un certain rapport : l'un est prescrit, et l'autre est l'effet de ma volonté. Or, ce qui se fait au-delà du commandement a par cela même un grand prix ; ce qui se fait par ordre n'en a pas autant. C'est pour cette raison, et non par la nature des choses que l'un l'emporte sur l'autre. Au fond, qu'est-ce qui égale la prédication? Par elle on rivalise avec les anges; cependant comme elle est un commandement et une dette, tandis que dans l'autre cas il y a acte de la bonne volonté, c'est en ce sens que nous établissons une préférence. Et c'est comme je viens de dire que Paul interprète, quand il dit : « Si je le fais de bon coeur, j'en aurai la récompense, mais si je ne le fais qu'à regret, je dispense seulement ce qui m'a été confié » ; prenant ces mots : « de bon coeur », et : « à regret » dans le sens de ce qui m'a été confié, ou : ne m'a pas été confié. De même ces expressions: « Ce m'est une nécessité », ne veulent pas dire qu'il agisse malgré lui, à Dieu ne plaise ! mais qu'il en est responsable comme d'un devoir à remplir, à la différence de la liberté de recevoir dont il a parlé. Voilà pourquoi le Christ disait à ses disciples : « Quand vous aurez tout fait, dites : Nous sommes des serviteurs inutiles ». (Luc, XVII, 10.) Quelle est donc ma (437) récompense ? « C'est que, évangélisant, je prêche gratuitement l'Evangile ». Quoi donc? Et Pierre, dites-moi, n'a pas de récompense? Qui en a jamais eu une pareille ? Et les autres apôtres? Comment a-t-il pu dire : « Si je le fais de bon coeur, j'en aurai la récompense, mais si je ne le fais qu'à regret, je dispense seulement ce qui m'a été confié? »
Voyez-vous encore ici sa prudence? Il ne dit pas : Si je ne le fais qu'à regret, je n'aurai pas de récompense; mais : « Je dispense seulement ce qui m'a été confié » ; montrant par là qu'il aura une récompense, mais celle de l'homme qui a exécuté un ordre, et non celle de celui qui agit de son propre mouvement, et plus que n'exige la loi. Quelle est donc la récompense? « C'est que, prêchant l'Evangile, je prêche gratuitement l'Evangile, pour ne pas abuser de mon pouvoir dans l'Evangile ». Voyez-vous comme il emploie toujours ce mot de pouvoir, pour prouver ce que j'ai dit bien des fois, que ceux qui reçoivent ne sont point blâmables? Il a ajouté : « Dans l'Evangile », pour spécifier , et en même temps empêcher qu'on ne donne trop d'extension au principe. Car c'est celui qui enseigne, et non celui qui ne fait rien qui doit recevoir. « Aussi, lorsque j'étais libre à l'égard « de tous, je me suis fait l'esclave de tous, pour en gagner un plus grand nombre ». Autre avantage! C'est beaucoup sans doute de ne rien recevoir, mais ce qu'il va dire est encore beaucoup plus. Qu'est-ce donc? Non-seulement, dit-il, je n'ai rien reçu, non-seulement je n'ai pas usé de ce pouvoir, mais je me suis fait esclave, et dans tous les genres et dans les sens les plus variés. Et ce n'est pas seulement en argent, mais ce qui est bien plus, en toutes sortes de choses que j'ai donné des preuves de cette servitude volontaire ; je me suis fait esclave, alors que je n'étais soumis en rien à personne, et qu'aucune nécessité ne m'y forçait : car c'est le sens de ces mots : « Lorsque j'étais libre à l'égard de tous ». Je me suis fait l'esclave, non pas d'un homme, mais de l'univers entier; c'est pourquoi il ajoute : « Je me suis fait l'esclave de tous ». J'avais sans doute reçu l'ordre de prêcher, d'annoncer ce qui m'était confié ; mais ces négociations, ces sollicitudes sans nombre ont été l'effet de mon zèle. J'étais seulement obligé de distribuer l'argent déposé en mes mains; mais pour en obtenir, je mettais tout en oeuvre, et je faisais plus qu'il ne m'était commandé. Comme il agissait en tout librement, avec allégresse et par amour pour le Christ, il avait un insatiable désir du salut des hommes.
C'est pour cela qu'il franchissait les barrières par un généreux excès, et s'élançait à travers tous les obstacles jusqu'au ciel. Après avoir parlé de son esclavage, il en détaille les modes divers. Quels sont-ils? « Je me suis fait », dit-il, « comme Juif avec les Juifs, pour gagner les Juifs ». Et comment cela? Quand il donnait la circoncision, pour détruire la circoncision. C'est pourquoi il ne dit pas : Juif », mais : « Comme Juif », par prudence. Que dites-vous ? Le héraut du monde entier, qui a touché le ciel même, en qui la grâce a jeté un tel éclat, daigne s'abaisser jusqu'à ce point? Oui. Mais s'abaisser ainsi, c'est s'élever. Ne voyez pas seulement ici son abaissement, mais songez qu'il relève celui qui est à terre et qu'il l'attire à lui. « Avec ceux qui sont sous la loi comme si j'eusse été sous la loi, quoique je ne fusse plus assujetti à la loi, pour gagner ceux qui étaient sous la loi ».
