31.
Toutefois, puisque le poète a voulu que le nombre de ces pieds fût invariable, il faut nous soumettre à cette loi, quand nous employons ce mètre. En effet, l'oreille n'est pas choquée, et elle ne le serait pas davantage, si on substituait soit un diiambe au choriambe, soit un ionique, en décomposant la longue en brève, soit tout autre pied d'égale mesure. Ainsi donc nous ne changerons rien à ce mètre, fidèles en cela, non au raisonnement qui commande d'éviter l'inégalité, mais au raisonnement qui fait respecter l'autorité. Le raisonneur en effet nous apprend que, parmi les mètres, il y en a d'invariables parle fait même de leur origine, comme celui dont nous venons de parler assez longuement; tandis que d'autres sont variables, c'est-à-dire, tels qu'on peut y substituer les pieds les uns aux autres, comme dans cet exemple :
Trojae qui primus ab oris, arma virumque cano.
Car ici on peut substituer partout l'anapeste au spondée1. Il en est d'autres qui ne sont ni tout à fait fixes ni tout à fait variables, comme :
Pendeat ex humeris dulcis chelys,
Et numeros edat varios, quibus
Assonet omne virens late nemus,
Et tortis errans qui flexibus2.
Tu remarqueras en effet qu'on peut substitues partout le dactyle au spondée et réciproquement, sauf au dernier pied, qui, dans la pensée de l'inventeur doit toujours être un dactyle; tu vois donc bien que, dans ces trois espèces de mètres, la tradition joue un grand rôle.