8.
Courons donc, mes frères, courons et aimons le Christ. Quel Christ? Jésus-Christ. Qui est-il? Le Verbe de Dieu. Comment est-il venu nous visiter dans notre infirmité? « Le Verbe s'est fait chair, et il a habité parmi nous1 ». Ce qu'avait prédit l'Ecriture est donc accompli : « Il fallait que le Christ souffrit et ressuscitât, le troisième jour, d'entre les morts2 ». Où se trouve son corps.? Où luttent ses membres? Où faut-il que tu sois pour l'avoir comme chef ? « Et qu'on prêchât, en son nom, la pénitence et la rémission des péchés à toutes les nations, en commençant par Jérusalem3 ».Que ta charité se répande là. Le Christ et l'Esprit-Saint par la bouche du Psalmiste s'écrient : « Votre commandement est singulièrement étendu4 »; et je ne sais qui pose des bornes à la charité aux portes de l'Afrique ! Si tu prétends aimer le Christ, que ta charité s'étende jusqu'aux confins de l'univers, parce que les membres du Christ s'y trouvent partout répandus. Si tu n'aimes qu'une portion de l'univers, ton amour est partagé ; et s'il est partagé, tu ne fais point partie du corps de Jésus-Christ; et si tu es en dehors de son corps, il n'est point ton chef. A quoi bon croire et blasphémer? Tu adores le Christ comme chef, et tu le blasphèmes dans son corps ? Il aime son corps. Si tu t'en es séparé, le chef ne t'a pas imité. Tu m'honores sans motif, te crie-t-il du haut du ciel : tu m'honores sans raison. C'est, par exemple, comme si un homme voulait en même temps te baiser à la tête, et écraser tes pieds. S'il pressait tes pieds avec des bottines armées de clous, au moment où il tiendrait ta tête entre ses mains pour l'embrasser, le laisserais-tu t'adresser tranquillement des paroles flatteuses ? Ne l'interromprais-tu point par tes cris, et ne lui dirais-tu pas : O homme, que fais-tu ? Tu m'écrases. Tu ne lui dirais pas : Tu écrases ma tête, puisqu'au moment même il donnerait à la tête une marque d'honneur: des cris s'échapperaient de ta tête, bien plus pour la défense de tes membres blessés, que pour la sienne propre, puisqu'on lui ferait honneur. Ta tête ne tiendrait-elle pas ce langage : Je neveux pas de tes témoignages de respect, ne m'écrase pas? Dis, si tu l'oses: Mais je n'ai pas voulu t'écraser. Dis à la tête : J'ai voulu te donner un baiser, j'ai voulu t'embrasser. Insensé, ne vois-tu pas que la partie de mon corps honorée par toi, tient à celle que tu blesses , puisqu'elles forment ensemble un seul et même tout? Tu m'honores par en haut, tu me blesses par en bas. La douleur du membre que tu foules à tes pieds surpasse de beaucoup la joie de la tête que tu honores; car le chef que tu honores gémit pour le membre que tu meurtris. Quel cri profère la langue ? J'ai mal. Elle ne dit pas : Mon pied a mal; mais : J'ai mal. O langue, qu'est-ce qui t'a touchée ? Qu'est-ce qui t'a frappée ? Qu'est-ce qui t'a serrée? Qu'est-ce qui t'a écrasée ? Personne. Mais je ne fais qu'un avec les pieds qu'on a écrasés. Comment veux -tu que je n'aie pas mal, puisque les liens qui m'unissent à eux ne sont pas rompus ?