20.
Nous lisons également : «Dieu créa le genre humain d'un seul sang1 ; voici l'os de mes os et la chair de ma chair2 ». Comme il n'est pas dit que c'est d'une seule âme que Dieu créa le genre humain; comme Adam ne dit pas : Voici l'âme de mon âme, il voit dans ces passages la négation de la transmission des âmes par voie de génération. Mais supposons qu'au lieu de ces mots « d'un seul sang », nous lisions; D'une seule âme, en conclurait-il qu'il ne s'agit pas de l'homme tout entier, ou que la propagation du corps y est formellement niée? De même si Adam avait dit: Voici l'âme de mon âme, il se garderait bien de trouver dans ces paroles une exclusion formelle de la chair, dont le mode de transmission était évident. En effet, l'Ecriture, dans son langage, prend très-souvent le tout pour la partie et la partie pour le tout. Si, au lieu de ces mots: «D'un seul sang », le texte portait : D'un seul homme, ce passage ne serait pas en opposition avec les adversaires de la transmission des âmes, quoique l'homme soit composé non pas d'une âme seulement, ou seulement d'un corps, mais à la fois d'un corps et d'une âme. Ils répondraient alors que le tout est pris pour la partie, c'est-à-dire que cette expression : L'homme, désigne seulement la chair. De même les partisans de la propagation des âmes, rencontrant ces mots : « D'un seul sang », les interprètent comme désignant l'homme tout entier, ou prenant la partie pour le tout. Les premiers se croient forts parce qu'il est dit : «D'un seul sang », et non pas d'un seul homme ; les seconds appliquent à leur système les paroles suivantes: «Le péché est entré dans le monde par un seul homme, et la mort par le péché, et c'est ainsi que la mort est passée dans tous les hommes par celui en qui tous ont péché3 » ; car il n'est pas dit : En qui la chair de tous a péché. Les premiers font bruit de ces mots : «Voici l'os de mes os et la chair de ma chair », car il n'y est question que de la chair et non de l'homme tout entier. Les seconds répliquent par les paroles qui suivent immédiatement : «Elle sera appelée femme parce qu'elle a été tirée de l'homme », car pourquoi n'est-il pas dit: Parce que sa chair a été tirée de l'homme, s'il n'y a que la chair qui soit tirée de l'homme et non pas la femme tout entière? En écoutant les deux côtés, sans aucun parti pris, on voit clairement qu'on ne saurait opposer aux partisans de la transmission des âmes les passages qui ne prennent dans l'homme que l'une des deux parties qui le constituent. Est-ce que ce n'est pas en prenant la partie pour le tout, que l'Ecriture a pu dire : «Le Verbe s'est fait chair4 », cette chair désignant évidemment l'homme tout entier ? Quant aux adversaires de la transmission des âmes, on ne saurait non plus leur opposer les passages où il est fait mention non plus de l'une ou de l'autre des deux parties constitutives de l'homme, mais de l'homme tout entier, car alors l'Ecriture a pu prendre le tout pour la partie, comme quand nous confessons que Jésus-Christ â été enseveli, ce qui ne peut s'appliquer qu'à son corps. De là je conclus que la transmission des âmes ne doit être ni témérairement affirmée, ni témérairement condamnée; et avant de se prononcer absolument pour l'une ou l'autre de ces deux opinions, il faudrait citer des témoignages explicites et formels.