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Works Augustine of Hippo (354-430) Contra Faustum Manichaeum Contre Fauste, le manichéen
LIVRE VINGT-UNIÈME. CONTRE FAUSTE, LE MANICHÉEN.

CHAPITRE XVI. LES DEUX NATURES DES MANICHÉENS SONT OU DEUX BIENS OU DEUX MAUX. DÉMONSTRATION PAR L'ABSURDE.

La charité y manquait-elle au point qu'on n'éprouvait aucun sentiment de pitié fraternelle pour ceux qui étaient menacés de supplices éternels sans les avoir mérités par aucune faute antérieure ? Quoi ! ces âmes, qui devaient être enchaînées sur ce globe, n'étaient-elles pas aussi des membres de votre dieu ? Tout au moins celles-là, dans la prévision de leur éternelle captivité, étaient en proie à la crainte, à la douleur. Ou si elles ignoraient ce point de l'avenir, il y avait donc en votre dieu une partie qui prévoyait et une partie qui ne prévoyait pas : comment cela ne formait-il qu'une seule et même substance ? Mais puisqu'il y avait, là, tant de maux, avant le mélange d'un mal étranger, pourquoi vanter dans votre dieu le bien pur, simple, souverain ? Vous êtes donc forcés de reconnaître que ces deux natures étaient en elles-mêmes ou deux biens, ou deux maux. Si vous convenez que c'étaient deux maux, nous vous permettrons de désigner celle que vous voudrez pour le plus grand mal; si au contraire vous voulez que ce fussent deux biens, dites lequel vous paraît préférable; ce sera le sujet d'une étude plus approfondie; mais qu'au moins vous renonciez à l'erreur qui vous fait dire que ces deux principes étaient deux natures, l'une bonne, l'autre mauvaise; par conséquent deux dieux, l'un bon, l'autre mauvais. Que si une chose est mauvaise parce qu'elle nuit à une autre, ces deux natures se sont nui réciproquement; l'une d'elles sera plus méchante, pour avoir la première désiré le bien d'autrui. L'une a donc fait le mal la première, et (autre a rendu le mal pour le mal non pas selon la loi du talion, oeil pour oeil[^1], que vous condamnez étourdiment, mais d'une façon beaucoup plus grave. Choisissez par conséquent celle des deux qui vous paraîtra la pire : ou celle qui a voulu nuire la première, ou celle qui a voulu et pu nuire davantage. L'une, en effet, a désiré, dans la mesure de ses petites facultés, jouir de la lumière; l'autre a détruit sa rivale de fond en comble. Si celle-là eût atteint l'objet de ses désirs, elle n'en eût certes point souffert; celle-ci pour repousser à jamais l'assaut ennemi, a causé à une partie de sa propre substance un dommage considérable. C'est l'application de ce mot si connu, mentionné par l'histoire et dicté par la fureur : « Que nos amis périssent, pourvu que nos ennemis tombent en même temps[^2] ». En effet, une partie de votre dieu a été condamnée à une souillure ineffaçable, afin qu'il y eût de quoi couvrir le globe où l'ennemi doit être à jamais enseveli tout vivant: car, quoique vaincu, quoique enfermé, il inspirera encore une telle crainte, une telle épouvante, qu'il faudra l'éternelle misère d'une partie du dieu pour procurer une sécurité quelconque au reste du dieu. O bonté merveilleusement innocente 1 Voilà que votre dieu, ce dieu à l'occasion duquel vous accusez si durement le peuple des ténèbres, se fait du mal à lui-même et en fait aux autres 1 C'est le reproche qui s'élève contre lui de ce globe reculé où son ennemi est enfermé, et une partie des siens clouée. Bien plus, la partie que vous appelez dieu, l'emporte en malice, puisqu'elle nuit et aux étrangers et aux siens. En effet, Hylé n'a point cherché à détruire le royaume d'autrui, mais seulement à s'en emparer; et si elle tuait quelques-uns des siens par le moyen d'autres qui lui appartenaient également, au moins elle les métamorphosait, afin qu'en mourant et en renaissant ils jouissent par intervalles du bonheur de vivre; tandis que Dieu, que vous dépeignez tout-puissant et tout bon, détruit les étrangers et condamne les siens pour l'éternité : et, croyance plus folle et plus étonnante encore ! Hylé blesse ses animaux dans le combat qu'elle livre, et Dieu punit ses membres dans sa propre victoire. Qu'est-ce que cela, ô hommes insensés ! Vous vous rappelez sans doute que Fauste a présenté Dieu comme un antidote, et Hylé comme un poison : et voilà que votre antidote fait plus de mal que le poison. Est-ce que Hylé enfermerait Dieu à jamais dans un globe si horrible, ou y fixerait ses propres entrailles ? Et, ce qui est plus criminel encore, calomnie-t-elle ces mêmes restes, de peur de paraître en défaut pour n'avoir pas pu les purifier? Car Manès dit dans la lettre du Fondement, que ces âmes ont mérité ce supplice parce qu'elles se sont laissées égarer loin de leur première nature lumineuse et qu'elles sont devenues ennemies de la sainte lumière, tandis que c'est Dieu lui-même qui les a poussées à s'égarer ainsi, afin que la lumière devînt ennemie de la lumière; injuste, s'il les y force malgré elles; ingrat, si elles y consentent et qu'il les condamne ensuite. Pour elles, si elles ont pu prévoir qu'elles démentiraient ainsi leur origine, tourmentées par la crainte avant la guerre, irrémédiablement souillées dans la guerre, éternellement condamnées après la guerre, elles n'ont jamais été heureuses. Si elles n'ont pas pu le prévoir, imprévoyantes avant la guerre, impuissantes dans la guerre, misérables après la guerre, elles n'ont jamais été divines. Or, évidemment Dieu était ce qu'elles étaient, d'après l'unité de substance. Pouvons-nous croire que vous compreniez la monstruosité de ces blasphèmes? Et cependant voulant justifier quelque peu la bonté de Dieu, vous prétendez qu'il communique un peu de bien à Hylé, de peur que, dans sa prison, elle ne tourne sa fureur contre elle-même. Hylé aura donc un peu de bien, alors qu'elle est sans mélange de bien? Serait-ce que comme Dieu, avant la guerre et sans mélange de mal, subissait le mal de la nécessité ; ainsi Hylé, après (la guerre et sans mélange de bien, jouira du bien du repos? Dites donc qu'il y a deux maux, dont l'un est pire que l'autre ; ou qu'il y a deux biens non souverains, dont l'un vaut mieux que l'autre, de telle sorte cependant que le meilleur soit le plus misérable. Car si cette grande guerre doit aboutir à ceci : que Hylé étant vaincue et les membres de Dieu étant attachés au globe, un peu de bien soit accordé aux ennemis, et beaucoup de mal infligé aux amis, voyez de quel côté est la victoire. Evidemment Hy1é est un poison, elle qui a pu former, fortifier, nourrir, entretenir ses animaux; et l'antidote c'est Dieu, qui a pu condamner et non guérir ses membres. Insensés, cette Hylé n'existe pas, ni ce dieu non plus. Ainsi rêvent ceux qui, ne supportant pas la saine doctrine, se tournent vers les fables[^3].

  1. Ex. XXI, 24.

  2. Cicer. pro Dejotaro.

  3. II Tim. IV, 3.

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Contra Faustum Manichaeum libri triginta tres Compare
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Contre Fauste, le manichéen
Gegen Faustus Compare
Reply to Faustus the Manichaean Compare

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