34. Du meilleur moyen d'acquérir la science des Écritures.
Quelques solitaires admiraient sa science si remarquable et l'interrogeaient sur le sens de quelques passages de l'Écriture. Un religieux, leur dit-il, qui désire acquérir l'intelligence des Écritures ne doit pas se fatiguer à lire un grand nombre de commentaires; il vaut mieux qu'il s'applique à purifier son coeur de tous les vices de la chair1. Dès que ces vices en sont bannis, les yeux de l'âme, dégagés du voile des passions , pénètrent comme naturellement les secrets des saintes Écritures.
Le Saint-Esprit ne nous a pas donné ces livres pour qu'ils restent obscurs et inexplicables ; ce sont nos péchés qui en cachent le sens aux yeux de notre âme, et dès que nous en sommes purifiés une simple lecture nous suffit souvent pour en avoir une parfaite intelligence, sans avoir recours à une foule de commentaires ; les yeux de notre corps n'ont besoin des leçons de personne pour voir, lorsque rien ne les obscurcit et ne les aveugle. Toutes les variations et les erreurs qu'on trouve dans les commentaires viennent de ce que leurs auteurs ne se sont pas assez appliqués, avant de les écrire, à purifier leurs coeurs : les défauts et les souillures de leur âme les conduisent à des interprétations différentes ou contraires à la foi, et les empêchent de bien comprendre la lumière de la vérité.
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Cassien est loin d'enseigner la doctrine du libre examen, par l'exemple et les conseils de l'abbé Théodore. Il ne dit pas que tous peuvent facilement comprendre les saintes Écritures, mais que le meilleur moyen d'en avoir l'intelligence est de purifier son coeur. Les coeurs purs sont nécessairement soumis à l'autorité de l'Église, et si l'abbé Théodore recommande de ne pas se fatiguer à lire des commentaires, c'est que ces commentaires, à son époque, étaient pleins de contradictions et d'erreurs qui obscurcissaient la vérité , au lieu de la faire connaître. Saint Thomas ne défendait pas l'étude, en disant qu'il avait plus appris aux pieds du crucifix que dans les livres. ↩